Aller au contenu

Page:Rambert - Études littéraires, t1, 1890.djvu/235

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

tôt on s’écriât : figures, figures ! Il y avait harmonie, il y avait accord préalable entre l’apologète et son public. Aujourd’hui la tâche du défenseur de l’Evangile s’est singulièrement compliquée. Ceux même qui n’ont jamais entendu prononcer les noms de Hegel, de Strauss, de M. Renan, ont subi leur influence de seconde ou de troisième main. Ils résistent sans toujours se rendre compte des motifs de leur résistance. Ils savent qu’aux raisons des docteurs chrétiens on oppose d’autres raisons ; le seul mot de miracle suffit à éveiller le doute. L’esprit de Voltaire a filtré jusqu’aux dernières couches de la société : « En vérité, disent les Provinciales, le monde devient méfiant et ne croit les choses que quand il les voit. »


Le temps a fait une brèche à l’œuvre de Pascal, et la brèche est assez large pour que la place ne soit plus tenable. L’ennemi peut pénétrer dans les remparts de la citadelle et en dominer de toutes parts la vaste enceinte. Forcée sur le dogme de la chute, l’alimentation de Pascal se trouve forcée aussi sur le second dogme essentiel, la venue d’un réparateur divin. L’idée de la chute est l’idée maîtresse. Pascal, nous l’avons dit, devait livrer sur ce point le plus décisif de ses combats. Dès que ce point n’est pas gagné, dès que l’adversaire de Pascal peut reconnaître les contradictions de la nature humaine, sans