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Page:Ravaisson - De l’habitude, 1838.djvu/14

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dehors, qui font leur existence même. Ce sont des existences tout extérieures, assujetties aux lois générales d’une nécessité commune. Au contraire, tout être vivant a sa destinée propre, son essence particulière, sa nature constante au milieu du changement. Sans doute, tout ce qui change est dans la nature, comme tout ce qui est est dans l’être. Mais seul, l’être vivant est une nature distincte, comme seul il est un être. C’est donc dans le principe de la vie que consiste proprement la nature comme l’être.

Le règne inorganique peut donc être considéré, en ce sens, comme l’empire du Destin, le règne organique comme l’empire de la Nature.

Ainsi l’habitude ne peut commencer que là où commence la nature elle-même.

Or, dès le premier degré de la vie, il semble que la continuité ou la répétition d’un changement modifie, à l’égard de ce changement même, la disposition de l’être, et que, par cet endroit, elle modifie la nature.

La vie est supérieure à l’existence inorganique ; mais par cela même elle la suppose comme sa condition. La forme la plus simple de l’être, en est nécessairement aussi la plus générale ; elle est par conséquent la condition de toute autre forme. L’organisation a donc dans le monde inorganique la matière à laquelle elle donne la forme. La synthèse hétérogène de l’organisme se résout, en dernière analyse, en des principes homogènes, et par conséquent inorganiques. La vie n’est donc pas, dans le monde extérieur, un monde isolé et indépendant ; elle y est enchaînée par ses conditions, et assujettie à ses lois générales. Elle subit sans cesse l’influence du dehors : seulement elle la surmonte et elle en triomphe sans cesse. Ainsi elle reçoit le changement par