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Page:Relation historique de la peste de Marseille en 1720, 1721.djvu/176

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Relation Hiſtorique


lades : mais malheureuſement pour eux, ils ne voyent paſſer que des Chrétiens, qui comme le Prêtre & le Levite du même Evangile, ſont attendris ſur leurs malheurs, mais n’ayant pour eux qu’une compaſſion ſterile, ils paſſent outre ſans les ſecourir. Cruel abandonnement, qui ſera toûjours la honte du Chriſtianiſme.

Pour voir toute la déſolation & toutes les horreurs de la Ville réünies dans un ſeul point de vûë, il n’y a qu’à jetter les yeux vers la ruë Dauphine, qui va de l’entrée du Cours à l’Hôpital des Convaleſcens. Tous ceux qui ſe trouvoient ſeuls dans leurs maiſons, & tous les pauvres faiſoient les derniers efforts pour ſe traîner juſques-là, dans l’eſperance d’y être reçûs : la plûpart n’y trouvoient pas de place, & n’ayant pas la force de s’en retourner, ils étoient obligés de ſe coucher dans la ruë, qui longue de cent quatre vingt toiſes, & large de cinq, a été pourtant toute couverte de malades, pendant un fort long-tems, & le nombre en étoit ſi grand, qu’on ne pouvoit pas ſortir