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Page:Relation historique de la peste de Marseille en 1720, 1721.djvu/324

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Relation Hiſtorique


étoient enfermés dans leurs maiſons, leſquels ennuyés d’une ſi longue retraite, & voyant la ville libre de toute infection, commencerent vers la mi-Octobre à ſe montrer & à ſe répandre dans les ruës, mais c’étoit avec des précautions qui faiſoient bien voir qu’ils n’étoient pas encore bien raſſûrés ; on ne ſe parloit que de loin, ſans ſe donner aucune de ces démonſtrations exterieures d’amitié, qu’on ſe donne reciproquement, quand on a été long-tems ſans ſe voir : quelque ami, quelque parent que l’on fût, on s’abordoit, pour ainſi dire, en étranger, & les complimens ne rouloient que ſur les félicitations reciproques de ſe voir échapés du commun naufrage : ce qui ne doit être entendu que des hommes ; car les femmes ne ſortoient pas encore. Ils portoient des bâtons ou des cannes de huit à dix pieds de long, qu’on appeloit communément les bâtons de St. Roch. Ils allongeoient de tems en tems leurs bâtons, pour faire écarter ceux qui paſſoient auprès d’eux, de peur d’en être touchés, & ſur tout les chiens qui étoient devenus ſi formida-