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Page:René de Pont-Jest - Le Fire-Fly.djvu/253

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Ramundo ! tubunchu hy nuh een boj’ho ! ( Lâches ! le pistolet n’est pas chargé !)

Je sentis un frisson glacé me saisir au cœur. Les rameurs avaient abandonné leurs avirons sur les tolets, ceux de l’arrière escaladaient les bancs pour se jeter sur moi.

— Ah ! il n’est pas chargé, misérable ! m’écriai-je en abaissant mon arme à la hauteur de la tête de mon domestique et en pressant du doigt la gâchette.

Puis je compris que si je faisais feu, la vue du sang agirait sur les Indiens comme sur des bêtes fauves ; que je me vengerais, mais que je serais ensuite à leur merci, sans autre arme qu’un court poignard qui était à ma ceinture. Profitant alors du sentiment de frayeur qui s’était emparé d’eux à mon geste plein de résolution, je relevai lentement mon arme, et je la déchargeai en l’air en disant :

— Tu vois que mon pistolet est chargé ! Je ne veux pas te tuer, je te ferai pendre. À vos bancs tous ! J’ai là encore de quoi faire taire cinq d’entre vous. Malheur au premier qui n’obéit pas !

Et j’abaissais mon revolver à la hauteur de leurs poitrines nues, pendant que je manœuvrais l’aviron de queue, de façon à faire reprendre à l’embarcation une marche rapide.

Mon domestique fut consterné, mais il ne chercha pas à se défendre. Avec celle fataliste soumission aux événements qu’ont toujours les Hindous, il s’accroupit dans le fond de l’embarcation, en laissant tomber