Aller au contenu

Page:René de Pont-Jest - Le Serment d’Éva.djvu/112

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

qui l’avait en quelque sorte complétée, il est certain qu’elle en eût été vivement impressionnée. Mais la protection de sa tante, les longues conférences qu’elle avait avec son avocat, le souvenir de ses souffrances de jeune fille et d’épouse, l’orgueil de ne plus être esclave qui s’éveillait en elle, et, qui sait ? peut-être aussi le rêve confus, inconscient encore, d’un avenir heureux dont elle ne se pensait pas indigne, tout cela l’avait peu à peu cuirassée contre les surprises du cœur.

De plus, son respect filial s’était amoindri, elle jugeait mieux son père ; ses grands raisonnements ne la touchaient pas comme jadis ; elle lisait entre les lignes de ses lettres et ne croyait pas en lui.

Elle lui répondit donc sans colère, sans amertume, même avec respect, mais pour lui affirmer que tout ce qu’il lui disait, elle se l’était dit à elle-même, et que, quelque douleur qu’elle éprouvât à faire un acte contraire à ses sentiments religieux, qui étaient également les siens, rien ne la ferait revenir sur une détermination que sa mère approuvait du fond de la tombe, elle en avait la pieuse conviction.

En se retrouvant tout entier dans cette fermeté de son enfant, le pamphlétaire eut un véritable accès de fureur, mais néanmoins, ne se tenant pas pour battu ; il partit pour Chartres, et huit jours plus tard, Éva, stupéfaite, vit arriver sa sœur rue d’Assas.

M. de Tiessant avait fait part aux supérieurs ecclésiastiques de sa fille aînée de quel cas de conscience il s’agissait, et pour sauver une âme en péril, pour