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Page:René de Pont-Jest - Le Serment d’Éva.djvu/113

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éviter à la religion un scandale, ils avaient autorisé la recluse, sœur Marie de la Miséricorde, à s’absenter de son couvent, eux qui ne le lui avaient pas permis, moins d’un mois auparavant, pour aller fermer les yeux de sa mère.

En reconnaissant la compagne de son enfance sous la robe de bure des Augustines, Mme Noblet lui sauta au cou en jetant un cri de joie, et Blanche, entraînée par cet élan, la serra tendrement sur son cœur ; mais cette première dette payée à une affection que le cloître ne lui avait pas enlevée, elle se rappela sa mission et, s’arrachant doucement à l’étreinte d’Éva, elle lui dit, après avoir hésité un peu, le but unique de son voyage à Paris.

La jeune religieuse parlait avec douceur, en suppliante plutôt qu’en conseillère, et sa sœur retrouvait dans chacune de ses paroles la thèse déjà développée par son père. Toutefois elle se gardait de l’interrompre. Elle n’entendait que sa voix et ne voyait que son visage, qui lui rappelaient les jours heureux d’autrefois. Ce fut seulement lorsqu’elle eut terminé que, s’agenouillant devant elle, prenant ses mains entre les siennes et la fixant de ses beaux yeux si limpides, elle lui répondit :

— Tu sais si je t’ai toujours aimée ; notre séparation m’a causé une inconsolable douleur, et je comprends tes efforts pour me ramener dans ce que tu appelles le droit chemin, parce que tu ne peux te rendre compte de ce que j’ai souffert, depuis ton départ de la maison dans mes sentiments les plus intimes,