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Page:Renan - Jesus, Levy, 1864.djvu/53

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était presque une impiété. L’argent des caisses publiques passait pour de l’argent volé. Le recensement ordonné par Quirinius (an 6 de l’ère chrétienne) réveilla puissamment ces idées et causa une grande fermentation. Un mouvement éclata dans les provinces du Nord. Un certain Juda, de la ville de Gamala, sur la rive orientale du lac de Tibériade, et un pharisien nommé Sadok se firent, en niant la légitimité de l’impôt, une école nombreuse, qui aboutit bientôt à une révolte ouverte. Les maximes fondamentales de l’école étaient qu’on ne doit appeler personne « maître, » ce titre appartenant à Dieu seul, et que la liberté vaut mieux que la vie. Juda fut évidemment le chef d’une secte galiléenne, préoccupée des idées du Messie, et qui aboutit à un mouvement politique. Le procurateur Coponius écrasa la sédition du Gaulonite ; mais l’école subsista et conserva ses chefs. Sous la conduite de Menahem, fils du fondateur, et d’un certain Éléazar, son parent, on la retrouve fort active dans les dernières luttes des Juifs contre les Romains. Jésus vit peut-être ce Juda, qui conçut la révolution juive d’une façon si différente de la sienne ; il connut en tout cas son école, et ce fut probablement par réaction contre son erreur qu’il prononça l’axiome sur le denier de César. Le sage Jésus, éloigné de toute sédition, profita de la faute de son devancier, et rêva un autre royaume et une autre délivrance.