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Page:Renan - Jesus, Levy, 1864.djvu/80

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s’imaginaient que c’était Élie ressuscité. La croyance à ces résurrections était fort répandue ; on pensait que Dieu allait susciter de leurs tombeaux quelques-uns des anciens prophètes pour servir de guides à Israël vers sa destinée finale. D’autres tenaient Jean pour le Messie lui-même, quoiqu’il n’élevât pas une telle prétention. Les prêtres et les scribes, opposés à cette renaissance du prophétisme, et toujours ennemis des enthousiastes, le méprisaient. Mais la popularité du baptiste s’imposait à eux, et ils n’osaient parler contre lui. C’était une victoire que le sentiment de la foule remportait sur l’aristocratie sacerdotale. Quand on obligeait les chefs des prêtres à s’expliquer nettement sur ce point, on les embarrassait fort.

Le baptême n’était, du reste, pour Jean qu’un signe destiné à faire impression et à préparer les esprits, à quelque grand mouvement. Nul doute qu’il ne fût possédé au plus haut degré de l’espérance du Messie, et que son action principale ne fût en ce sens. « Faites pénitence, disait-il, car le royaume de Dieu approche. » Il annonçait une « grande colère, » c’est-à-dire de terribles catastrophes qui allaient venir, et déclarait que la cognée était déjà à la racine de l’arbre, que l’arbre serait bientôt jeté au feu. Il représentait son Messie un van à la main, recueillant le bon grain, et brûlant la paille. La pénitence, dont le baptême était la figure, l’aumône, l’amendement des mœurs, étaient pour Jean les grands