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Page:Renan - Vie de Jesus, edition revue, 1895.djvu/533

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À peine informé de l’accusation, il témoigna sa mauvaise humeur d’être mêlé à cette affaire[1]. Puis il s’enferma dans le prétoire avec Jésus. Là eut lieu un entretien dont les détails nous échappent, aucun témoin n’ayant pu le redire aux disciples, mais dont la couleur paraît avoir été bien devinée par le quatrième évangéliste. Au moins, le récit de ce dernier est-il en parfait accord avec ce que l’histoire nous apprend de la situation réciproque des deux interlocuteurs.

Le procurateur Pontius, surnommé Pilatus, sans doute à cause du pilum ou javelot d’honneur dont lui ou un de ses ancêtres fut décoré[2], n’avait eu jusque-là aucune relation avec la secte naissante. Indifférent aux querelles intérieures des Juifs, il ne voyait dans tous ces mouvements de sectaires que les effets d’imaginations intempérantes et de cerveaux égarés. En général, il n’aimait pas les Juifs. Mais les Juifs le détestaient davantage encore ; ils le trouvaient dur, méprisant, emporté ; ils l’accusaient de crimes

  1. Jean, xviii, 29.
  2. Virg., Æn., XII, 121 ; Martial, Épigr., I, xxxii ; X, xlviii ; Plutarque, Vie de Romulus, 29. Comparez la hasta pura, décoration militaire. Orelli et Henzen, Inscr. lat., nos 3574, 6852, etc. Pilatus est, dans cette hypothèse, un mot de la même forme que Torquatus.