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Page:Renaud - Recueil intime, 1881.djvu/112

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RECUEIL INTIME


À qui jamais votre âme, en sa souffrance fière,
Ne voulut adresser ni plainte, ni prière,
Voilà que dans votre ombre elle entre, et, plusieurs fois,
Cherche à vous attirer doucement de la voix.
Vous devriez courir vers elle ! non ! votre âme,
Étouffant son aveu, cachant plus fort sa flamme,
Se refuse au bonheur, trouve une volupté
A créer, de soi-même, et pour l’éternité,
Son désespoir. Le rêve à la clarté remonte.
Et dès qu’il n’est plus là, que seul, n’ayant plus honte,
Sans témoin vous pouvez aimer, vous vous serrez
La poitrine à deux mains, et vous la déchirez.
Et sachant que le mal doit être irréparable,
D’autant plus consumé d’un feu plus misérable,
Vous restez, à jamais bercé par le seul bruit
Du sang de votre cœur qui tombe dans la nuit.