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Page:Renouvier - Les Dilemmes de la métaphysique pure, 1901.djvu/108

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nullement cet avantage, que l’imagination réclame pour elle, sur la doctrine des phénomènes et des lois, de fournir un fondement pour la croyance a l’identité et à la permanence de la conscience, comme aussi à la réalité des corps dont nous ne recevons que des impressions : ce sont les deux ordres de synthèses auxquels le phénoménisme sans lois de Hume ne trouvait aucune explication parce que son analyse était la méthode inverse de celle qui en les constituant les explique. La substance n’y sert de rien, car il ne s’agit pas seulement de croire qu’elle existe parce qu’on l’imagine, mais encore de croire qu’elle a les propriétés d’identité et de permanence qu’on lui prête. Or la croyance aux lois qui établissent ces mêmes propriétés dans l’ordre constitutif et dans le développement des phénomènes donne pour notre esprit le même résultat. Il suffit, et c’est l’œuvre de l’induction la plus simple et la plus naturelle, que par des généralisations nous étendions à l’avenir l’efficacité et l’action des mêmes lois qui sont empiriquement constatables dans les connexions dont se forme toute notre connaissance des choses, de celles que nous rapportons à l’esprit, et de celles qui nous sont représentées dans les corps. L’identité et la permanence ne sauraient être pensées comme rien de plus que ces mêmes lois avec toute leur extension et leur perfection possibles, ou idéales, dans l’espace et dans le temps, soit qu’il y ait ou non telle chose que des substances dans le monde.

La question de la substance est donc indépendante de ces considérations morales ; tout son intérêt porte, non sur l’avantage imaginaire qu’auraient les substances pour nous certifier les réalités, mais sur les moyens que leurs idées fournissent pour poser des êtres en soi,