Aller au contenu

Page:Renouvier - Les Dilemmes de la métaphysique pure, 1901.djvu/118

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Apportée par une religion strictement monothéiste, la doctrine de la création s’opposait à l’hellénisme, qui n’avait pu s’affranchir de l’imagination irréfléchie de l’éternité, de la matière et du mouvement. L’infini, sous cette forme, semblait donc banni de la spéculation ; il ne l’était pas. La pensée, s’arrêtant au Créateur comme à une personne immuable, supprimait, il est vrai, le procès à l’infini des phénomènes du monde. Mais l’hypothèse d’un Dieu éternellement vivant, encore bien que spirituel, ne changeait que la nature des phénomènes à considérer dans le recul indéfini du temps ; elle les faisait passer dans les modifications internes, dans les pensées de cet être divin, et ne les niait pas comme distincts avant la création et régis par la loi de nombre ; ou, si elle les niait, la question métaphysique de l’infini et du temps subsistait toujours, car le recours à l’absolu ne résout pas la difficulté que soulève l’identité de l’être absolu et du Créateur en une même personne.


XXXVII

L’infini en extension. — L’intuition ne s’étend pas moins à l’indéfini dans l’espace que dans le temps. Cependant, il a toujours paru plus facile de faire abstraction d’une étendue inoccupée au-delà, pour se représenter le monde fini, que du temps avant les phénomènes pour se les représenter commençant à être. La question de lieu est plus facile à écarter que la question d’origine, et l’idée d’ubiquité a pris dans la spéculation beaucoup moins d’importance que l’idée de l’éternité, qui lui est parallèle. Cependant Parménide, en sa doc-