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Page:Renouvier - Les Dilemmes de la métaphysique pure, 1901.djvu/143

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la première aussi, a réduit le monde à l’unité d’un principe invariable ; c’est celle de Parménide ; c’est ensuite celle de Démocrite qui le revendique, et qu’on a rapprochée avec raison de la précédente, sous ce rapport, quoique fondée sur un principe ontologique contraire.

Parménide n’a pu introduire aucun élément de variété, aucun accident, dans l’Être sans devenir que posait sa théorie, et s’il en avait admis un dans le monde des phénomènes, ce qu’on ne nous dit pas, ce ne pouvait être qu’en lui attribuant aussi un caractère d’illusion. Démocrite remplaçant le Sphairos unique de Parménide par l’infinité des atomes ne reconnut de cause au monde que celle qui agit dans leurs chocs et dans leurs tourbillons, phénomènes enchaînés sans aucune scission possible et faisant bloc dans le temps. Rien n’est accidentel, toutes choses sont par raison et nécessité. La raison réside dans les propriétés des atomes et dans le mouvement. Les faits de pensée en sont des résultats, et, par conséquent, nécessaires comme les mouvements eux-mêmes.

L’opposition aux systèmes de la causalité illusoire et de la causalité mécanique vint de la notion du Noûs d’Anaxagore. Anaxagore rejeta la nécessité, mais aussi l’accident : l’un, comme n’étant que le nom de la cause, et n’en définissant pas la nature, l’autre comme n’en marquant que l’ignorance. Ce philosophe transporta la causation de l’ordre mécanique à l’ordre intellectuel. Le Noûs, doué de la parfaite connaissance et de l’entière prévoyance des choses, meut, compose, et coordonne les éléments. Anaxagore introduisait ainsi la finalité, avec la cause, dans l’explication de la nature, mais sans la rattacher à une volonté consciente, sans toucher à la question du mal, et, de plus, en revenant