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Page:Renouvier - Les Dilemmes de la métaphysique pure, 1901.djvu/145

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taines d’un agent moral. Cette thèse socratique et platonicienne de l’assimilation de la science à la vertu, posait, en contrepartie, l’âme de l’ignorant comme entraînée fatalement à ses actes par le désir, et esclave de la nature. Tel est le déterminisme psychologique qui devait se développer dans les doctrines, parallèlement au déterminisme naturaliste dont l’universalité, sans cela, se dément.

La théorie de la vertu-science, impliquant ce mode mental de la doctrine de la nécessité, s’accordait mal avec l’explication générale du monde par le meilleur, que Platon reprochait à Anaxagore d’avoir manqué. C’est le premier exemple que nous trouvons de la contradiction entre l’optimisme théologique et la condition réelle du monde. Platon fait sortir des mains de l’excellent Démiurge une œuvre où le bien, quoique possédant l’empire, admet le mal en partage : des âmes pétries de vertus et de vices, occupant des rangs assignés par la justice distributive à leurs qualités, soumises à l’épreuve de la sensation et du désir, et mises en demeure de dompter la passion pour obéir à la justice. Quand il s’agit d’assigner la raison du choix que fait une âme, et d’où dépend le rang qu’elle doit occuper dans le règne animal, ce philosophe ne trouve pas à placer le motif ailleurs que dans les passions mauvaises, comme si elles constituaient la nature propre de cette âme coupable, qu’il ne dit pas cependant en avoir reçu une plus infirme que les autres, originairement. Il déclare que le mal, quoique étranger aux dieux, est nécessaire en ce bas monde de la mortalité, où il faut qu’existe une opposition au bien, même dans la direction générale des phénomènes. En un mot, Platon ne voit nullement pour l’âme une réelle possibilité des détermi-