Aller au contenu

Page:Renouvier - Les Dilemmes de la métaphysique pure, 1901.djvu/153

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

bilité qu’une cause se produise pour donner le commencement à une suite de phénomènes, sans être elle-même la suite de certains autres en une connexion qui la prédétermine. En vertu d’un raisonnement des plus simples, il faudrait que la série intégrale se prolongeât rétrocessivement de cause en cause à l’infini (XXXV-XXXVI).

Rien n’oblige le défenseur du libre arbitre de s’engager dans la question du premier commencement ; car un acte libre suppose des antécédents et des conditions préalables : la cause, en ce qui le touche, est particulière ; elle est un commencement, mais sous de certains rapports seulement. Les stoïciens étaient conséquents, quand ils réclamaient l’unité totale et solidaire des phénomènes, allant de l’origine à la fin d’une évolution limitée par la règle de Zeus et l’inflexible Destin. Ils concevaient clairement une cause au-dessus de celles qui n’étaient à leurs yeux que des modes d’une liaison ordonnée. Les modernes évolutionnistes qui n’établissent aucune origine des choses investie formellement de la qualité de cause se rendent l’idée de causation entièrement vide. Les sciences physiques affectées correctement à l’étude des lois ne leur fournissent que des conditions, sous le nom de causes. D’une autre part, la métaphysique du déterminisme réduit pour eux la causalité à l’enchaînement, l’anéantit par la solidarité, universelle, et, n’offre rien à l’esprit, qui réponde à la notion commune de force active employée à produire. Comment ces penseurs peuvent-ils mettre sans cesse en avant cette objection à la thèse du libre arbitre : « Il y aurait donc des phénomènes sans cause ! » alors que nulle critique ne peut leur découvrir une idée capable de remplacer la notion commune de l’action ?