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Page:Renouvier - Les Dilemmes de la métaphysique pure, 1901.djvu/182

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opiniâtre à présenter ses motifs pour des démonstrations qui ne se pourraient nier de bonne foi.

En fait, le libre arbitre est un objet de croyance dont la réalité peut devenir assez douteuse, à la réflexion, pour que le fatalisme ait occupé et occupe la place qu’on sait dans l’histoire des opinions humaines. Assimiler la liberté à un fait d’intuition, ou qui se doit conclure du plus simple raisonnement, c’est moins prendre dans la question une sérieuse attitude logique, qu’obéir à cette sorte d’impulsion dogmatique, à laquelle on cède en soutenant sa propre affirmation comme si elle pouvait être indépendante de ce qu’il entre de personnel dans une opinion, encore qu’on sache fort bien qu’une affirmation contraire est celle de personnes placées sur le même pied que vous pour être informées de la chose, supposé qu’elle pût être absolument vérifiée. Mais le partisan de la nécessité se trouve dans un cas pareil. Son dogmatisme, appuyé sur l’idée qu’il se fait de la loi de causalité, d’après un postulat de sa doctrine, doit, à l’en croire, s’imposer à l’esprit, indépendamment des coefficients personnels qui la lui ont fait adopter. Il n’en est point ainsi, et même il pourrait se dire, en y réfléchissant, qu’il est nécessaire que d’autres pensent autrement que lui, de même qu’il est nécessaire qu’il pense lui-même comme il pense. N’est-ce pas une conséquence de son opinion ?

J. Lequier a, le premier, fait ressortir par de très nouvelles analyses la nature de croyance de chacune des deux thèses : nécessité ou liberté. Il a fait voir que la connaissance, dans le sens philosophique du mot, est toute subordonnée au parti que l’on prend entre les deux, et il en a soumis l’option à des dilemmes tout à