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Page:Renouvier - Les Dilemmes de la métaphysique pure, 1901.djvu/196

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voir s’en écarter, pour la première loi constitutive de la pensée exprimée dans le discours, l’attribution des qualités et des actions à un sujet qui tient le rôle d’une personne. C’est un signe indubitable de la facilité et de la nécessité qu’il y avait, et qu’il y a toujours, de personnifier le sujet.

Les mythes helléniques ou latins, relatifs aux phénomènes naturels, alliaient l’idée de personnalité à celle d’une source de qualités et d’effets qui étaient sans rapport, ou n’en avaient que de lointains, avec ceux que l’homme est capable de produire. Quand vint, dans cet anthropomorphisme, le moment où les dieux d’origine naturaliste furent définis pour les croyances nationales comme des personnes distinctes de leurs fonctions d’agents cosmiques, l’alliance de ces deux caractères ne tarda pas à paraître impossible. La réflexion conduisit, d’un côté, à l’incrédulité religieuse, effet tout négatif, mais, de l’autre, à un changement de méthode en théologie. On substitua aux personnes divines, à l’interprétation personnaliste des phénomènes, de purs symboles de qualités, de fonctions et de vertus, érigés en objets d’adoration.

Nous sommes ici à l’origine de l’obstacle que l’esprit humain a rencontré pour maintenir l’union de l’idée de Dieu et de l’idée de personne, — union qu’on peut croire avoir été d’abord naturelle, — ou, plus tard, pour la rétablir en lui donnant un fondement logique, après que les penseurs eurent traversé de nombreux systèmes auxquels elle répugnait plus ou moins. C’est la métaphysique réaliste qui porte la faute de la rupture, tant en elle-même, ou par ses applications les plus importantes, que par les déviations que son esprit a fait subir à la méthode idéaliste, partout où l’idéalisme a pu pré-