Aller au contenu

Page:Renouvier - Les Dilemmes de la métaphysique pure, 1901.djvu/202

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

la conscience individuelle. L’origine brahmanique des âmes était donc plutôt le symbole marquant le point de départ d’une évolution dont les périodes dépendent d’une loi éternelle, que l’acte de la division réelle d’une Âme-substance douée de la conscience de soi.

D’un autre côté, les transmigrations d’une âme, punie ou récompensée, d’une vie à l’autre, selon ses mérites acquis dans chacune, ou ses fautes, ne composent pas, sans la mémoire, les phases d’existence d’une conscience unique. On peut dire que l’âme individuelle rentrait réellement dans l’indivision à la fin de chaque vie, et non pas seulement lors de son retour au sein de Brahma, à la fin de chaque évolution cosmique, selon la doctrine brahmanique, attendu qu’à chaque transmigration elle perdait la mémoire. La substance seule de cette âme, c’est-à-dire un support sans qualités, une sorte de matière abstraite possédait l’immortalité.

Ainsi le substantialisme, un certain genre d’animisme, matérialiste sans forme déterminée, était la fiction qui fournissait l’image de la personnalité en apparence reconnue. Les dieux, les hommes et les animaux, conçus comme les formes diverses d’un même sujet, étaient des âmes soumises à la métensomatose, pour lesquelles il ne pouvait y avoir de progrès moral, puisque faute de mémoire, une même conscience ne les accompagnait pas dans leurs transformations matérielles, dans leur élévation ou leur descente à travers les degrés de l’animalité.

Ce vice du système des transmigrations se retrouve, nous l’avons remarqué ailleurs dans un des mythes de Platon, où ce philosophe montre les âmes buvant les eaux du Léthé avant de réinformer des corps.

À l’origine du bouddhisme indien, le dégoût de la doc-