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Page:Renouvier - Les Dilemmes de la métaphysique pure, 1901.djvu/201

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donné que dans son idée, ni l’idée hors d’une conscience, sujet réel, à moins que l’objet ne soit lui-même une autre conscience. Mais le réalisme, qui s’applique à la chose, en certaines philosophies, s’applique, en d’autres, à l’idée séparée de la conscience et tient le personnalisme en échec.

LIX

La chose et la personne dans les doctrines indiennes. — Chez le seul peuple de l’antiquité qui, en dehors de l’hellénisme, ait connu de véritables écoles philosophiques, — au moins en mettant à part la secte si particulière et presque toute morale des Lettrés de la Chine, — il semble, au premier examen, que la théologie brahmanique, source du concept principal sur lequel a porté toute la spéculation postérieure, ait placé dans la personne l’origine du monde, et regardé le monde comme n’étant essentiellement que le théâtre historique des vies successives des personnes. Un idéalisme dont de rares philosophes grecs, qualifiés de sophistes, ont à peine approché, présentait aux Indiens la nature, hormis les âmes actrices et spectatrices, comme un jeu d’apparences, une fantasmagorie. Brahma, principe du monde, semblait posséder, selon la doctrine orthodoxe aussi bien que pour les mythes ou légendes, une essence personnelle, mais Brahma, fondement de l’émanation, était aussi l’âme universelle. Or, la nature essentiellement individuelle de la conscience s’oppose à ce que l’on conçoive une âme multiple, des âmes conscientes émanées d’une autre âme consciente. La conscience n’est pas sans l’individualité, la personne sans