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Page:Renouvier - Les Dilemmes de la métaphysique pure, 1901.djvu/209

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qui ressortissaient à l’expérience ; sa doctrine ne devait elle-même entrer dans le mouvement général des esprits que longtemps après, et cela seulement dans sa partie métaphysique, pour s’allier à celle de Platon. L’unique siège d’un idéalisme empirique fut le pyrrhonisme, qui, laissant systématiquement en question la nature de la réalité, substance ou cause, n’en releva et n’en étudia partout que les idées, pour les mettre en contradiction les unes avec les autres dans les déterminations qu’en faisaient les philosophes, et conclure par le précepte pratique de la suspension du jugement.

Cependant l’idéalisme, avec une autre méthode, était entré dans la philosophie, plus d’un siècle avant que des disciples de Démocrite le découvrissent sous la forme d’un phénoménisme empirique. Sa forme initiale était simple, directe, aprioriste, issue des premiers succès de l’abstraction scientifique en géométrie. À peu près contemporaine du plus ancien substantialisme naturaliste des philosophes ioniens, elle résultait de l’application de la méthode réaliste de l’esprit à lui-même, à ses propres formes, et non plus à son objet concret. Il était dans l’ordre, chez une nation hautement douée en intelligence, que cette méthode qui, chez les uns, prenait spontanément le sujet de la spéculation dans la nature vivante, chez d’autres, le cherchât dans les concepts régulateurs des phénomènes, dans leurs modes de liaison fixes, définissables à raison de leur généralité.

Les premières découvertes auxquelles il dut d’entrevoir l’étendue des lois arithmétiques et géométriques qui régissent l’univers suggérèrent à Pythagore sa doctrine des nombres réalisés. Le Nombre fut la forme que l’Idée revêtit ainsi originairement, et qu’elle devait conserver en grande partie dans une école destinée à