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Page:Renouvier - Les Dilemmes de la métaphysique pure, 1901.djvu/216

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les essences platoniciennes, sujets en soi, modifiées seulement par un changement de sens de cette participation, que Platon supposait remontant du monde sensible et muable à l’ordre des idées invariables et éternelles. Ce sont ces dernières, maintenant, qui descendent du genre suprême, comme espèces ou degrés de l’être, et propriétés des choses ; ou encore ce sont les formes substantielles dont le nom cette fois s’emprunte à la terminologie aristotélique, ce qui ne fait pas beaucoup de différence ; ou enfin les types intelligibles de toutes les pensées et de tous les modes d’être réels que Dieu, source de toute réalité, distribue aux créatures que par sa présence et par son acte, à chaque instant, il fait être, et être ce qu’elles sont.

Cette doctrine diffère du panthéisme néoplatonicien par la substitution du principe de la création à celui de l’émanation ; elle le dépasse peut-être dans l’atteinte portée à l’individualité en principe, lorsqu’elle nous présente, dans le thomisme, la conservation du monde par l’action divine comme une création continuée qui fait de toute modification réelle d’une créature un acte toujours présent de Dieu. Le plus haut degré du réalisme nous apparaît dans la thèse théologique de l’identité de la puissance et de l’intelligence au sein de la nature divine ; identité qui se poursuit dans celle de la création avec la pensée de la création, ou des êtres avec les idées. On rétrécit habituellement la question du réalisme en ne considérant que l’aspect logique des universaux, mais si on la prend dans son ampleur, on doit reconnaître que donner aux idées le titre de sujets, c’est leur retirer la qualité objective et la fonction qui leur conviennent proprement dans la conscience, soit de l’homme, soit de Dieu (XIII-XIV).