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Page:Renouvier - Les Dilemmes de la métaphysique pure, 1901.djvu/32

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étant réalisés à leur tour, conduisent à une vue de la génération du monde par l’introduction graduelle de la limite et du nombre dans l’espace sans bornes. Le ciel et les astres se constituent grâce à la détermination des intervalles numériques. C’est une sorte de respiration cosmique, d’où procède l’évolution divine sous l’action des contraires.

Le tableau des dix oppositions du dualisme pythagoricien comprenait d’autres termes : la lumière et l’obscurité, le bien et le mal, etc., qui avaient le même caractère de réalisme, tout en se rattachant aux lois naturelles. L’inévitable arbitraire des applications donnait à ces termes, et surtout aux nombres particuliers affectés à la représentation des idées, un air de simple analogie ou de symbolisme ; mais le nombre était toujours le principe de la théorie pythagoricienne.

Le réalisme, avec une application bien différente de celle qu’inspirait l’esprit mathématique, fut également la méthode de trois philosophes des plus illustres de l’âge antésocratique. Quoique attachés au principe de la substance matérielle, ils prenaient hors du monde physique l’explication de ses conditions d’existence et de changement. Ils ne recouraient, à cet effet, ni à des propriétés immanentes des éléments ou de leur tout, comme les autres physiciens, ni à des phénomènes personnifiés, comme font les mythologues, mais à des idées générales de l’ordre passionnel, qui étaient des sortes d’inconditionnés puisqu’elles établissaient les conditions des phénomènes sans qu’on pût se rendre compte de leur propre raison d’être.

Suivant Héraclite, l’agent des transformations du « Feu éternellement vivant », matière du monde, et qui la fait passer par de continuels changements allant