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Page:Restif de la Bretonne - Monsieur Nicolas, t. 2, 1883.djvu/100

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fraîche et colorée comme la rose, fille d’une jolie mère, une femme mariée, sans enfants, nommée Mme Chevrier, et une jeune personne, filleule et cousine de Marguerite, appelée Marianne Taboué ; celle-ci me fit tressaillir : elle approchait de mon modèle. Enfin, le moment de la communion arrivé, je vis, après que les hommes se furent retirés, avancer les femmes, puis les jeunes filles, et parmi celles-ci, une que je n’avais pas encore vue et qui les effaçait toutes. Elle était modeste, belle, grande ; elle avait l’air virginal, le teint peu coloré, pour donner sans doute plus d’éclat au rouge de la pudeur, et marquer davantage son innocence ; elle était faite comme les Nymphes, mise avec plus de goût que ses compagnes, et surtout elle avait ce charme tout-puissant, auquel je ne pouvais résister, un joli pied. Son maintien, sa beauté, son goût, sa parure, son teint virginal, tout me présenta la réalité de l’adorable chimère de mon imagination… « C’est elle ! La voilà ! » dis-je assez haut ; car je le pensais trop vivement pour ne pas le dire ; elle s’empara de toute mon attention, de tout mon cœur, de toute mon âme, de toutes mes pensées, de tous mes désirs ; je ne vis plus qu’elle… J’ignorais son nom. La messe finit. Je sortis. La céleste beauté marchait quelques pas devant moi ; Marguerite Pâris l’aborda, et lui dit : « Bonjour, mademoiselle Rousseau ! » Et elle l’embrassa, en ajoutant : « Ma chère Jeannette, pour l’âme, comme pour le corps, vous êtes un ange… Vous n’étiez pas à l’offerte ?