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Page:Restif de la Bretonne - Monsieur Nicolas, t. 2, 1883.djvu/133

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donné l’usage et rendu mes sens brûlants. J’étais souvent la semaine entière sans voir une maîtresse idolâtrée, qui m’inspirait l’amour de la vertu ; à la vérité, je m’enflammais l’imagination pour elle, en allant sonner midi : mais au retour, je voyais Marguerite, fille de quarante ans, j’en conviens, mais fraîche comme une dévote, ou plutôt comme une fille qui, ayant de la fortune, n’avait jamais souffert du besoin. D’ailleurs, on sait que cet âge, dans les femmes, n’est pas un obstacle aux désirs pour les jeunes gens qui arrivent à la puberté ; il semble même que la nature les porte de préférence vers les femmes faites, non pour aimer tendrement, mais pour jouir. Marguerite Pâris était bien faite, propre sur elle et dans ses alentours ; elle se coiffait avec goût, et précisément comme Mlle Rousseau ; ses chaussures venaient de Paris, et avaient la grâce de celles de nos jolies femmes ; si elle était en sabots, ils étaient bien faits et à talons élevés. Le jour de l’Assomption, elle avait des mules neuves de maroquin noir, dont les coutures conservaient leur éclatante blancheur, avec un talon mince, qui affinait encore la jambe la mieux faite ; celle-ci était couverte d’un bas de fin coton, à coins bleus. Mes yeux se fixèrent malgré moi sur le joli pied de Marguerite ; je ne pouvais les en détourner… Il faisait très chaud ; après vêpres, la gouvernante se déshabilla et se mit en blanc : sa jupe écourtée laissait voir le bas de sa jambe. Je me trouvai dans une situation semblable à celle où, quatre ans aupara-