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Page:Restif de la Bretonne - Monsieur Nicolas, t. 2, 1883.djvu/209

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sous un courgiller ou cornouiller, et, dans ma verve vineuse, je fis un épisode où, sous des noms supposés, je racontais mon aventure avec Marguerite Miné : je m’en rappelle très peu, ne l’ayant jamais relu. Le soleil était prêt à se coucher lorsque l’épisode fut achevé ; il me restait encore plus d’une lieue à faire et ma course fut rapide. À mon arrivée, on se mettait à table pour souper ; et qu’on juge de ma surprise en voyant Lemoine, qui paraissait arrivé depuis longtemps !… Immédiatement après mon départ, il lui était arrivé d’excellente chaux : Droin, le fils du procureur fiscal de Courgis, était venu à passer à cheval ; Lemoine, qui était en gaîté, sella le sien, et après avoir bu quelques coups avec ce nouvel hôte, il profita de sa compagnie pour venir lui-même prendre le jour d’envoyer sa chaux. Ils avaient suivi l’unique chemin ; mais moi, écrivant alors à l’écart, je les avais entendus sans les voir. Je fus grondé devant lui avec beaucoup de hauteur ; et comme, d’après son récit fait bonnement, on savait que j’avais bu du vin, on voulut voir si j’étais gris, afin de m’en faire un crime ; mais je répondis avec un timide sangfroid, qui ne donna sur moi aucune prise. Cependant j’étais si troublé que je n’allai pas au trou du mur pour y serrer mon cahier (mais je n’aurais pas évité mon sort : Marie Pinon, le matin, baissée entre deux plates-bandes de pois rames, m’avait aperçu ôtant la pierre de ma cachette, et, sans savoir ce que j’en avais tiré, elle avait averti l’abbé Thomas). Après souper, je me hâtai de me mettre au lit, me