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Page:Restif de la Bretonne - Monsieur Nicolas, t. 2, 1883.djvu/34

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deux aimables camarades, je me calmai petit à petit. Fayel surtout me montra, dans les commencements, une douceur, une aménité qui lui gagnèrent absolument mon cœur. Quant à Jean-Baptiste, il paraissait ressembler d’abord un peu aux coquettes, dont il avait la recherche, l’élégance et les charmes, mais il n’était ni capricieux, ni léger.

La première chose qu’on m’enseigna, ce fut à lire correctement, c’est-à-dire avec les consonnances et les inflexions convenables. Je fus bien surpris, la première fois que je lus en public, dans les Figures de la Bible, de Royaumont, d’entendre presque à chaque mot que je prononçais, la clef du sous-maître frapper la table ! Mais il ne fallut me le dire qu’une fois : dés le lendemain, M. Maurice me cita comme un modèle d’intelligence et d’application. Ce fut en mon absence néanmoins ; mais Nicolas Fayel me l’apprit le soir en nous couchant, car il était mon voisin de lit.

Lié d’une étroite amitié avec ce jeune camarade, je ne fus pas plus heureux qu’autrefois, mais, par des causes opposées : mes deux premiers amis, grossiers paysans, manquaient de sensibilité ; celui-ci fur au contraire susceptible, capricieux, jaloux : c’est ce qui, depuis, ma rendu si sensible aux peines des femmes ; nouveau Tirésias, en un sens, j’ai fait le rôle d’amante contrainte, gênée dans ses paroles et jusque dans ses regards. Fayel, une fois préféré, me querellait, me tourmentait, dès que j’avais parlé, ou seulement répondu au joli frère Jean-Baptiste,