Aller au contenu

Page:Restif de la Bretonne - Monsieur Nicolas, t. 2, 1883.djvu/50

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

J.-J. Rousseau, à ce parfait dialecticien, d’où lui viennent sa sagacité, sa profondeur, sa connaissance du cœur humain ? De son éducation religieuse, dans une secte qui a le plus grand rapport avec le Jansénisme. Je reviens.

Les Jansénistes aiment l’ordre ; c’est un effet de la réflexion. Notre journée était employée admirablement ! Pas un instant n’était perdu : prière le matin, après le lever ; on se rinçait la bouche avec de l’eau et du vinaigre : on déjeunait ; frère Étienne, un de nos camarades, coupait et distribuait le pain. On écrivait jusqu’à dix heures : la lecture haut sur le même livre, afin que le nommé pût suivre sur-le-champ ; on chantait une demi-heure ; frère Étienne le panetier était maître de chant. Nous dînions à midi. La récréation durait une heure. On prenait les livres d’étude, Nouveau-Testament, Catéchisme, Rudiment (qu’on n’avait pas voulu que j’apprisse). On récitait à trois ; on écrivait, on faisait des règles. On goûtait à quatre. À la demie, commençait la lecture particulière d’instruction et d’amusement ; le bibliothécaire, frère Jean-Baptiste, tenait un registre de tous les livres commencés, et il apportait à chacun le sien, jusqu’à ce qu’il fût achevé ; on rechoisissait alors sur le registre, parmi les volumes débarrassés… Les trois heures environ de lecture libre et de choix, étaient pour moi un temps vivement désiré ! J y pensais le matin, en me levant ; à mesure que cet heureux instant approchait, je palpitais de plaisir ; l’heure arrivée, je jouissais, je