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Page:Revue Musicale de Lyon 1904-03-09.pdf/10

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revue musicale de lyon

Cette réserve, qui peut n’être que l’effet d’une insuffisance dont je m’excuse, n’enlève rien au mérite de la belle œuvre sincère et loyale de M. Witkowski : ce n’est pas à celle-ci qu’on reprochera de bonne foi de manquer de « mélodie » et de sacrifier la qualité expressive à la recherche de vaines curiosités harmoniques. Remercions la société Zimmer de nous l’avoir fait entendre dans les meilleures conditions d’interprétation qu’on pouvait lui souhaiter, et faisons des vœux pour que le public lyonnais n’attende pas trop longtemps l’occasion d’applaudir la Symphonie qui a déjà fait son tour de France, mais qui a toujours brûlé jusqu’ici l’étape où les concitoyens de M. Witkowski aimeraient la voir s’arrêter.

F. Baldensperger.

La Société Zimmer avait donné la veille une audition privée dans les salons de M. et Mme F. Duringe. Au programme figurait outre le quatuor en mi de G. M. Witkowski dont il est rendu compte plus haut, le quatuor en mi mineur de Beethoven et le quatuor (op. 47) pour piano et cordes de Schumann. Mme Duringe, dont on ne saurait trop louer l’admirable talent, interprétait la partie de piano. Les Zimmer ont joué avec leur ordinaire perfection, faisant ainsi de cette fête mondaine une des meilleures soirées artistiques de la season.

Une séance privée, réservée aux membres actifs et aux membres honoraires de la Schola Cantorum, a été donnée lundi soir par le quatuor Zimmer. Après une intéressante causerie de M. Witkowski, que nous publierons prochainement, les excellents artistes que son MM. Zimmer, van Hout et Doehaerdt ont interprété admirablement le quatuor en la mineur de Beethoven et le quatuor de César Franck, qui n’avait pas encore été joué à Lyon.

Ce soir, quatrième concert de la Symphonie Lyonnaise, avec le concours du violoncelliste Vandœuvre.

Au programme : Symphonie Héroïque de Beethoven, airs de ballet de Castor et Pollux, de Rameau, Ouverture d’Iphigénie en Aulide de Gluck ; Concerto de Molique.


LA PASSION

Les représentations populaires du drame de la Passion sont en Allemagne et en Suisse une manifestation répandue de l’art, et une occasion précieuse d’éducation esthétique. La réputation du spectacle grandiose d’Oberammergau est universelle. Sans atteindre de telles proportions, le spectacle auquel nous étions conviés dimanche nous apparaît comme une très heureuse initiative, à laquelle il convient de ne pas ménager les encouragements et les louanges, d’autant que le succès en a été aussi vif que mérité.

Le drame de la Passion qui rappelle les origines mêmes du théâtre médiéval, puisque au moyen âge toute manifestation intellectuelle naissait de l’Église, est donné dans la paroisse suburbaine de Notre Dame des Anges.

La situation même de la salle, derrière les lônes de la Vitriolerie, dans ce coin de paysage à deux pas du quartier le plus populeux de la ville, disposition des chœurs dans des tribunes voilées, l’orchestre couvert à la manière de l’Opéra-Comique ou des Théâtres allemands, l’allure à la fois sacrée et mondaine du spectacle, donne à ces représentations une couleur locale intense, savoureuse, piquante, propre à réveiller l’attention du critique blasé par la quotidienne habitude des théâtres lyriques et des salles de concerts. Il y a là une note curieuse de Folk-lore, que nous nous reprocherions de ne pas signaler aux intellectuels que passionne la recherche de cette mode nouvelle.

Le scénario, emprunté aux Évangiles, se compose de tableaux vivants, de scènes parlées et de chœurs. Deux récitants, figurent le Christ et l’Évangéliste, et commentent, de l’avant-scène, les parties mimées du drame.

L’action se noue à l’entrée du Christ à Jérusalem, pour se terminer à la Résurrection. L’auteur, qui s’est caché sous le voile modeste de l’anonymat, s’en est tenu à la lettre même de l’orthodoxie évangélique, sans faire intervenir la tradition, toujours quelque peu sujette à controverse. La scène du désespoir et de la pendaison de Judas par exemple n’a rien emprunté aux travaux de l’exégèse