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Page:Revue de Paris, 23e année, Tome 6, Nov-Dec 1916.djvu/774

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sorts disjoints ; une longue plainte se répercuta dans leurs êtres.

Celui qui avait parlé à Valentine, dit d’une voix morte :

— Cette résolution est trop formidable. Nous ne pouvons la prendre encore. La vie serait également intolérable pour tous deux. Que sont quelques mois, et même une année, pour Valentine ?

Les freux croassaient plus fort, un chat-huant éleva sa voix gémissante, les deux Givreuse baissaient la tête, perdus dans une méditation douloureuse. Chacun sentait qu’il lui était impossible de consentir à ce que l’autre fût sacrifié.


IX


Savarre continuait son enquête. Il avait fait un voyage à Gavres et à Viornes. À Gavres, le personnel de l’hôpital était presque entièrement renouvelé. Il n’y retrouva que le major Formental. Celui-ci avait gardé un souvenir net de l’événement, mais, peu à peu, il y attachait moins d’importance. Savarre s’en aperçut. Guidé par un sentiment jaloux, plus encore que par l’intérêt des Givreuse, il s’efforça d’atténuer le fantastique de l’aventure ; il la rattacha à des phénomènes pathologiques.

Formental, qui admirait aveuglément Savarre, se laissa dominer par son illustre confrère et raconta ce qu’il savait, sans rien demander en retour.

Cette entrevue n’apportait point de faits nouveaux au neurologiste : il s’y attendait, il n’était venu à Gavres que pour vérifier les témoignages.

À Viornes, il ne retrouva aucun des témoins de la première heure. Il lui fallut voyager pendant cinq jours avant de rencontrer le major Herbelle et l’infirmier Alexandre. Là encore, il ne cherchait que des confirmations : elles furent telles qu’il les prévoyait.

Il laissa entendre à Herbelle, comme du reste à Formental, que le « cas Givreuse » ressortissait à la pathologie nerveuse,