Je répétai, je me fis comprendre.
— Ce ne sont pas là des yeux humains… murmura l’étudiant. Et le teint !… Est-ce le teint de votre race ?
Alors, je dis, avec un terrible effort de ralentissement :
— Je suis venu pour me faire voir par un savant !
— Vous n’êtes donc pas malade ?
— Non !
— Et vous êtes de Bornéo ?
— Non !
— D’où êtes-vous alors ?
— De Zwartendam, près de Duisburg !
— Alors, pourquoi votre compagnon prétend-il que vous êtes de Bornéo ?
— Je n’ai pas voulu le contredire…
— Et vous voulez voir un savant ?
— Oui.
— Pourquoi ?
— Pour être étudié.
— Pour gagner de l’argent ?
— Non, pour rien.
— Vous n’êtes pas un pauvre ? un mendiant ?
— Non !
— Qu’est-ce qui vous pousse à vouloir être étudié ?
— Mon organisation exceptionnelle…
Mais j’avais encore, malgré mes efforts, parlé trop vite. Il fallut me répéter.
— Êtes-vous sûr que vous me voyez ? redemanda-t-il en me regardant fixement. Vos yeux sont comme de la corne…
— Je vois très bien…
Et, allant de droite et de gauche, je pris vivement des objets, je les déposai, je les jetai en l’air pour les rattraper.
— C’est extraordinaire ! reprit le jeune homme.
Sa voix radoucie, presque amicale, me pénétra d’espérance :
— Écoutez, dit-il enfin, je crois bien que le docteur Van den Heuvel pourra s’intéresser à votre cas… Je vais le faire prévenir. Vous attendrez dans la chambre voisine… Et, à propos… j’oubliais… vous n’êtes pas malade, en somme ?
— Pas du tout.
— Bon. Tenez… entrez là… Le docteur ne tardera guère…