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pensées concises, colorées et comme inscrites sur un caillou blanc. À ne prendre que les observations et maximes morales qui abondent dans ce livre, on ferait un petit recueil de pensées isolées, sans transition, un chapitre à la façon de La Rochefoucauld, qui classerait ce romancier de vingt-six ans parmi les moralistes les plus scrutateurs.

Le style de M. de Musset dans la Confession, est, comme en général, vif, net, court, transparent ; le tour aisé et concis, surtout dans les récits du second volume, se ressent de la prédilection que l’auteur affiche pour Candide et Manon Lescaut. Bien des paillettes pourtant, placées çà et là, annoncent le cousinage de Crébillon fils, de même que des métaphores un peu franches, qui se dressent tout à coup, attestent le culte enflammé du grand Shakespeare. L’auteur, dont la plume devient plus sûre de jour en jour, a quelque chose à faire pour l’entière harmonie de tous ces élémens divers, et volontiers disparates. S’il n’a nulle part atteint à une élévation plus soutenue et plus énergique que dans le discours de Desgenais, il n’a nulle part non plus faussé sa manière plus évidemment que dans le chap. ii de la première partie, où l’histoire et la métaphysique se déguisent sous un incroyable abus de métaphores. L’auteur en commençant, et n’étant pas encore sûr de son effet, a voulu faire, on le sent, un déploiement inaccoutumé ; plus tard, à mesure qu’il avançait, sentant que les vraies beautés ne lui manquaient pas, il a osé être simple. J’ai noté, dans ce chapitre ii, page 8, une phrase sur Napoléon, sur son arc, sur la fibre humaine qui en est la corde, et sur les flèches que lance ce Nemrod, et qui vont tomber je ne sais où : une pareille phrase, si on la lisait dans la traduction du Titan de Jean-Paul, ferait dire : « Cela doit être beau dans l’original, » et ce demi-éloge de la pensée serait, à mes yeux, la plus sensible critique du style et de l’expression.

Avant de laisser le brillant et nouveau témoignage de force et de talent donné par M. de Musset, aux limites et presque en dehors de la critique littéraire sur laquelle nous avons trop insisté peut-être, que l’auteur, que l’ami nous permette un vœu encore. La confession de l’enfant est faite ; l’endroit malade est retranché, Octave l’a dit, je le crois ; il le faut. L’auteur de l’épisode de Mme Pierson (je m’obstine à isoler et à appeler ainsi la troisième partie), est guéri enfin. Quand il parlera donc de son mal désormais, que ce soit de loin,