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LA PRESSE EN ANGLETERRE.

qu’un certain nombre d’insulaires se trouvent réunis sur quelque coin de l’Europe ou de l’Asie, le comptoir existe à peine qu’il lui faut un organe de ses intérêts, un journal. Il n’y a pas d’intérêt en Angleterre qui n’ait le sien.

Par un étrange contre-sens de la législation, cet aliment de première nécessité est aussi cher qu’une consommation de luxe. Un journal coûte 7 pence par numéro (plus de 14 sols) ; il y a même des journaux du dimanche qui se vendent un shilling (25 sols). Sans doute une entreprise de ce genre, qui a des correspondans sur les principaux points du globe, et qui est tenue de recueillir une bibliothèque de documens, entraîne des frais immenses que supporte en définitive le public des lecteurs. Mais le prix exorbitant des journaux provient surtout des droits de timbre et de la taxe sur le papier, qui contribuent à en élever la valeur. Le timbre seul est de 4 pence par feuille (plus de 8 sols). Les Anglais, qui, en toutes choses, considèrent le résultat, ont flétri ces taxes du nom d’impôt sur l’instruction (taxes on knowledge).

Le bill voté par le parlement dans les derniers jours de la session, et qui est exécutoire à partir de septembre, réduit le timbre des journaux à 1 penny (2 sols). Cette taxe les affranchit de tout droit de poste dans le royaume-uni ; combinée avec la diminution des taxes sur le papier, elle va rendre la presse plus accessible à toutes les classes de la population. Les journaux qui existent descendront plus bas et iront plus loin ; de nouvelles feuilles s’organiseront en concurrence avec la presse établie. La publicité ne peut manquer de recevoir, sous toutes ses formes, une grande et salutaire impulsion.

Pour mieux juger la révolution qui se prépare dans la presse anglaise, il n’est pas inutile d’examiner le régime sous lequel elle a grandi, et de montrer le point d’où elle partira, dans cette nouvelle ascension.

La liberté de la presse, dans la Grande-Bretagne, ne repose pas comme en France sur un droit écrit ; elle existe au même titre que la liberté de toute autre industrie : elle est dans la coutume, dans les mœurs, titre qui est supérieur chez ce peuple, et antérieur à sa constitution. Il n’y a que les exceptions qui soient formulées en lois.

Depuis l’année 1695, où la censure (licensing act) a été abolie,