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explique l’apparence d’un plan, d’un dessin, d’un type, sans qu’il soit possible d’en saisir et d’en fixer l’image. L’apparence est dans ces traces déposées en chaque animal, en chaque organe ; l’impossibilité de le saisir est dans ces transitions mêmes qui donneraient au type, au plan, au dessin, une extension telle qu’il n’aurait plus rien que de vague et d’informe.

Arrêtons-nous à ce point de vue, et reportons-nous vers les animaux perdus, dont l’écorce du globe recèle la dépouille. Leur restauration, qui est la gloire de Cuvier, a étonné le monde. Outre des formes singulières, il est vrai, mais marquées du cachet commun que porte l’animalité sur notre terre, cette restauration ne nous a-t-elle rien appris sur l’histoire et les phases de la zoologie ? Les couches diverses renfermaient des animaux divers, de telle sorte que, là aussi, une série, un développement, se manifestent. Les terrains anciens et les terrains comparativement modernes ont nourri jadis des espèces placées sur des degrés différens de l’échelle ; et la chronologie zoologique est favorable à l’idée d’une transformation, d’une évolution successive.

Tandis que l’anatomie retrouvait les antiques débris d’animaux effacés à jamais du livre de vie, la physique pénétrait de son côté dans les entrailles du globe ; et, combinant la forme de la planète, qui est celle que prendrait un corps liquide qui s’est solidifié, la chaleur qui va en augmentant avec rapidité de la surface du globe vers le centre, le froid intense des espaces interplanétaires où s’épanche comme dans un réservoir le calorique primitif de la terre, et enfin la présence de palmiers et d’autres productions des latitudes chaudes sous des latitudes aujourd’hui trop froides pour les nourrir, la physique a prononcé que jadis le globe de la terre avait été très chaud, et qu’il s’était refroidi peu à peu, de sorte que, dans de telles conditions, des êtres organiques n’ont pu paraître que successivement, et au fur et à mesure, sur la surface d’un monde qui ne devenait que lentement habitable. De ce côté encore la loi de transformation et d’évolution se confirme et s’établit.

Mais je dis plus. Quand on ne saurait point par tous ces faits positifs que la vie ne s’est pas manifestée tout d’abord sur notre terre sous la forme qu’elle a de notre temps, il aurait été possible de le conclure de la conception métaphysique de la série animale. La série une fois reconnue ascendante (et nous savons qu’elle l’est) implique développement, évolution et laps de temps. Un philosophe qui aurait saisi la loi de cette série, aurait pu prononcer que sur le