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questions administratives, mais que des votes négatifs sur certaines parties du budget entraîneraient sa retraite. Malgré cette déclaration comminatoire, qu’elle trouva insolite, la commission ne se montra pas disposée à fléchir, et elle proposa à la chambre la réduction énorme de 2,036,347 francs sur le seul budget de l’intérieur. La chambre retrancha 1,636,347 francs, et le ministère voulut bien se montrer satisfait. Ce ne fut pas tout. 68,000 francs pour dépenses secrètes, demandés comme vote de confiance, furent retranchés par la chambre sur le budget de la guerre. 22,000,000, tel est le chiffre des réductions qui furent adoptées par la chambre dans cette session ! L’opposition du ministère fut grande, et pourtant, malgré ses déclarations devant la commission du budget, il ne crut pas devoir se retirer.

Les pensions des veuves Daumesnil et Gérard furent encore refusées. En 1835, refus d’une demande d’indemnité aux victimes des évènemens de Lyon, demande appuyée par le ministre de l’intérieur, M. Thiers.

Refus d’un projet de loi pour construction d’une salle des séances de la chambre des pairs.

Réduction à cinq ans d’une demande de monopole des tabacs par le gouvernement. M. Thiers se proposait de donner sa démission, mais il resta, à la prière de la réunion Fulchiron

Poursuivrons-nous encore dans les discussions d’intérêt tout-à-fait matériel cette série des échecs ministériels d’une époque dont on ne cesse d’opposer les succès et les principes au ministère actuel ? — Nous verrons que la chambre des pairs fut obligée de refaire en entier un projet de loi relatif à l’état des officiers. La loi des douanes reçut les plus importantes modifications dans la chambre des députés ; le chemin de fer de Paris à Roanne fut rejeté ; la loi relative à l’établissement royal de Charenton fut retirée, à cause des mauvaises dispositions de la chambre ; enfin toutes les autres lois furent amendées, refaites, rejetées ou retirées. Qu’on nous parle maintenant des échecs de 1838 !

Cependant nous sommes loin de contester, tout en énumérant les disgraces des ministres d’alors, les services qu’ils ont rendus. Ce n’est pas leur moindre mérite que d’avoir compris qu’il fallait rester au ministère, malgré tous leurs échecs et en dépit des clameurs qui les sommaient chaque jour de quitter leurs places, et de la céder à des hommes mieux au courant des besoins du pays. Le ministère n’en fit rien, et s’il n’eût pas été livré à ses divisions intérieures, sa durée eût été plus longue. Le ministère actuel a aussi ses défaites, moins nombreuses sans nul doute. Comme les ministères auxquels il a succédé, il a rempli sa tâche en travaillant à maintenir l’ordre et en soutenant au dehors les intérêts de la France ; mais son principal mérite, sa force, consistent dans l’exemple du bon accord qu’il a donné. On peut dire que, moins uni, il ne se trouverait pas avoir affaire à la coalition qui l’attaque aujourd’hui. Les partis se sont alliés contre lui en perdant l’espoir de l’entamer et de porter le désaccord dans son sein. Il y a aujourd’hui un an que M. Molé et ses collègues ont pris le maniement des affaires, et pour la première fois depuis l’établissement de la monarchie de juillet, une année s’est