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Page:Revue des Deux Mondes - 1845 - tome 10.djvu/645

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lui adresser de Coppet, nous apprend l’usage qu’il en avait su faire. Dans tout ce qui suit, nous ne craindrons pas de nous étendre à plaisir sur les relations avoisinantes de Fauriel, et d’y introduire le lecteur son sujet. Nous serons en cela fidèle à l’esprit même de l’homme dont presque toute la vie se passa à répandre ses lumières et à verser ses idées au sein de l’amitié. L’action de Fauriel sur le public se fit long-temps et surtout à travers ses amis. Il faut revenir par eux à lui, pour le connaître tout entier.


Coppet par Genève, ce 12 thermidor (an VIII).

« Vous avez fait un extrait de mon ouvrage, monsieur (lui écrivait Mme de Staël), qui est un ouvrage lui-même ; et ce que vous dites en particulier sur la manière dont j’aurais dû traiter le chapitre de la philosophie est plein d’esprit et de justesse. Je ferai quelques changemens dans la seconde édition qui va paraître, et je répondrai, dans les notes et dans une courte préface, a quelques objections de Fontanes, laissant de côte les insinuations personnelles ces jouissances de l’esprit de parti. Si vous pouvez naturellement faire annoncer dans un journal que je me propose de réfuter, dans les notes de ma seconde édition, quelques objections de fait en littérature par d’autres faits avérés, j’en serai bien aise, mais seulement si cela se peut sans vous donner trop de peine. Que pense-t-on de ce Mercure en général ? Vaut-il la peine de le citer dans un ouvrage ? Vous voyez avec quelle confiance je vous adresse toutes ces questions, mais j’espère que vous prenez quelque intérêt à ma réputation depuis que vous avez si efficacement contribué à l’augmenter. — Nous espérons la paix ici, et nous admirons beaucoup Bonaparte[1] ; mais nous sommes un peu fâchés, nous autres protestans, de ce qu’il appelle les Anglais des hérétiques. Avez-vous pensé de même à Paris ? L’adresse ne peut être généralement approuvée dans un empire de trente millions d’hommes, on regarde de partout, il faut bien qu’on aperçoive tout ; mais le succès est une parfaite réponse. — Je me fais un grand plaisir de vous voir beaucoup cet hiver, monsieur ; il me semble qu’en écrivant vous m’avez fait encore mieux sentir tout le charme de votre esprit ; votre timidité en voilait quelques parties. — Je vais bientôt, à mon grand regret, vous renvoyer Benjamin ; vous avez bien voulu lui promettre, de lui envoyer la Clef du Cabinet, où il est question de moi. J’attends l’arrivée de ces deux numéros pour remercier Daunou[2]. — Me permettez-vous

  1. Mme de Staël était sous cette impression entièrement vraie à ce moment (Juillet 1800).
  2. La lettre de Mme de Staël à M. Daunou se trouve imprimée dans les Documens biographiques sur Daunou publiés par M. Taillandier.