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Page:Revue des Deux Mondes - 1846 - tome 13.djvu/660

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À mon bon ami Thomas Knyvett, écuyer, en sa maison d’Ashwellthorpe, cette lettre.

« Janvier 1642, Norfolk.

« MONSIEUR,

« Je ne puis prétendre avoir de crédit auprès de vous pour aucun service que je vous aie rendu, ni vous demander de faveurs pour ceux que je pourrais vous rendre ; mais comme j’ai conscience de ma disposition à faire, pour obliger un galant homme, tout ce que la courtoisie exige, je ne crains pas de commencer en demandant votre protection pour vos pauvres honnêtes voisins, les habitans de Hapton, lesquels, d’après ce que j’apprends, sont dans une fâcheuse position, et sont menacés de la voir empirée par un certain Robert Brown, votre tenancier, qui, peu satisfait des sentimens de ces gens, cherche tous les moyens de les inquiéter.

« Véritablement, rien ne me pousse à vous faire cette demande, hormis l’intérêt que m’inspirent et leur bonne foi et les persécutions que j’apprends qu’ils sont exposés à souffrir pour leur conscience et pour ce que le monde appelle leur obstination.

« Je n’ai pas honte de solliciter en faveur d’hommes placés en un lieu quelconque sous une telle oppression ; je fais en cela comme je voudrais que l’on fit pour moi. Monsieur, le siècle présent est batailleur, et la pire des colères, à mon avis, est celle dont la différence d’opinion est la base ; blesser les hommes dans leurs personnes, dans leurs maisons ou dans leurs biens, ne peut y être un bon remède. Monsieur, vous ne vous repentirez pas d’avoir protégé contre l’oppression et l’injure les malheureux habitans de Hapton, et la présente n’est à d’autres fins que de vous prier de le faire. Monsieur, la sincère gratitude et les plus grands efforts pour s’acquitter de cette obligation ne vous manqueront pas de la part d’

« OLIVIER CROMWELL. »


Le défenseur déterminé des opinions populaires se montre dans ces lettres que Thomas Carlyle a déterrées, et qui dormaient chez les descendans de Knyvett et de Barnard. On n’a pas besoin de commenter cette énergique protection donnée au peuple et ce ton sévère, dominateur, décisif, courtois cependant. Le progrès de Cromwell s’y marque d’une façon certaine, et par des degrés reconnaissables. Bientôt « l’association puritaine » de l’est englobe deux nouveaux comtés, mouvement qui place sept comtés à la fois sous l’autorité d’un seul homme. Nous ne sommes qu’en 1642. On avait essayé de grouper ainsi plusieurs autres provinces ; ces associations, qui n’avaient pas de Cromwell, tombèrent l’une après l’autre, et ne laissèrent subsister que