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Page:Revue des Deux Mondes - 1846 - tome 15.djvu/655

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souterrains qu’exigent les mines, ils sont forcés de se contenter d’exploiter à ciel ouvert les affleuremens de celles que le hasard ou leur tact sans égal leur fait rencontrer. Quelques indices généraux les guident, il est vrai, dans leurs recherches, La gangue ou matrice du minerai est presque toujours composée de roches de quartz. Les roches de cette espèce forment quelquefois, sur un espace d’une lieue et plus, des crêtes ou saillies qu’on appelle crestones. Ces crestones, brûlés par le soleil et entièrement dépourvus de végétation, sont aisément reconnaissables. Le gambusino ne voyage jamais sans être armé de sa barreta, espèce de pique en fer dont la pointe est trempée, et, quand il a découvert un creston, il soumet à l’action d’un feu violent les pierres qu’il en a détachées à l’aide de son instrument ; puis, selon la richesse du minerai qu’il a reconnu, il l’exploite ou l’abandonne. Parfois aussi un coup de pique détache un morceau où étincellent aux rayons du soleil des paillettes ou des veines d’or. Seul, loin de toute habitation, sans prendre le temps de faire les dénonciations légales, le gambusino exploite alors les éclats qui volent sous sa pique, jusqu’au moment où, le filon s’enfonçant dans les entrailles de la terre, le travail à ciel ouvert devient impossible. Alors il vend sa mine à celui qui peut l’acheter, et s’éloigne philosophiquement à la recherche de quelque autre gîte métallifère.

La poudre d’or, comme les mines, est pour les gambusinos l’objet de recherches souvent périlleuses. C’est encore le même instinct qui les guide le long des rivières ou des torrens qui du haut des montagnes roulent leurs flots chargés d’or dans le fond des vallées. Souvent l’intrépide chercheur arrive ainsi jusqu’au désert, où les Indiens exercent en maîtres la même industrie, et presque toujours il paie de sa vie l’audace qui l’a porté à se mesurer avec ces formidables concurrens ; ou bien, après avoir eu à combattre la faim, la soif, les bêtes fauves, après avoir, en bravant mille dangers, exploité à la hâte un creston ou un placer, il revient avec un butin considérable, avec le regret de n’avoir pu faire un plus long séjour dans quelque Eldorado lointain, et le souvenir de mille aventures terribles ; ses récits, où la description de trésors fabuleux tient une grande place, ne manquent jamais d’allumer la cupidité. Des familles entières partent à leur tour avec un âne chargé de pioches, de bateas (grandes sébiles de bois) et de quelques menues provisions, pour aller braver les mêmes dangers dans ces déserts où souvent elles ne trouvent qu’un tombeau. D’après des calculs rigoureux, sur dix millions d’or que le Mexique jette annuellement dans la circulation européenne, un quart au moins de cette somme est le produit des recherches du gambusino.

On sait maintenant en quoi consiste l’industrie du chercheur d’or. Quant au théâtre sur lequel cette industrie s’exerce, c’est tantôt le flanc