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Page:Revue des Deux Mondes - 1847 - tome 19.djvu/810

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même, en réalité, cette égalité de droits si vivement réclamée pour eux, puisque, pour en jouir, ils n’avaient qu’à prêter un serment imposé à tous les sujets anglais sans distinction de croyances. Ce qu’exigeait la situation de l’Irlande, c’étaient des améliorations positives, c’était la multiplication des moyens d’instruction populaire qui auraient pour effet de la rendre peu à peu protestante en éclairant les populations ; il pouvait être bon aussi d’assurer au clergé catholique un salaire modéré qui le placerait jusqu’à un certain point sous l’influence du gouvernement.

Cependant la position que lord Sidmonth avait prise, ou plutôt que les circonstances lui avaient faite à l’égard du ministère tory, était trop contraire à ses sentimens naturels pour qu’il pût s’y maintenir long-temps. Ce ministère, jusqu’alors si faible et si chancelant, avait d’ailleurs besoin, sinon de son appui personnel, au moins de celui de ses adhérens. Le chef du cabinet, Perceval, essaya de lui persuader d’engager ses amis à prendre des emplois dans l’administration, tout en lui avouant les obstacles qui s’opposaient à ce qu’il y entrât lui-même. Cette proposition un peu naïve ne fut pas acceptée, mais peut-être eut-elle pour effet de rendre lord Sidmouth moins hostile au ministère en lui faisant entrevoir que, lorsque le temps aurait aplani ces obstacles, fondés uniquement sur des préventions individuelles, les conseillers de la couronne s’estimeraient heureux d’obtenir son concours. A partir de ce moment, on le vit saisir toutes les occasions d’établir une nuance entre sa politique et la politique des whigs, ses alliés temporaires. Sans se rallier encore formellement à celle des ministres, il affectait de dire qu’elle avait pris un caractère plus satisfaisant, mieux fait pour inspirer confiance à la nation. Il trouvait encore que leurs actes prêtaient à de nombreuses objections, mais presque toujours il en admettait le principe, et il les défendait contre les motions de censure présentées par les whigs. La persévérance avec laquelle le gouvernement soutenait les efforts des Espagnols et des Portugais insurgés contre Napoléon, malgré les malheureux commencemens et l’inégalité apparente de cette lutte, fut surtout l’objet de sa constante approbation. Les whigs, qui blâmaient cette persévérance, eurent, en cette circonstance, le malheur de ne pas compter assez sur la fortune et la puissance de l’Angleterre. Ce sont là de ces erreurs où les oppositions se laissent trop souvent entraîner et qu’elles expient d’ordinaire par un long exil du pouvoir.

Lord Sidmouth, devenu ainsi l’auxiliaire du cabinet, ne pouvait manquer de s’en voir bientôt ouvrir les portes. Au commencement de l’année 1812, cinq ans après la dissolution du dernier ministère dont il avait fait partie, il fut appelé pour la troisième fois aux fonctions de président du conseil, et, peu de mois après, il remplaça comme secrétaire d’état de l’intérieur lord Liverpool, qui succédait, en qualité de premier lord de