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la trésorerie, à Perceval, assassiné par un fou. Des emplois plus ou moins importans furent aussi conférés à ses amis ; l’un d’eux, Vansittard, aujourd’hui lord Bexley, devint chancelier de l’échiquier.

Ce moment est important dans l’histoire de l’Angleterre. La dernière tentative faite avec plus ou moins de sincérité par le prince régent pour former un ministère whig venait d’échouer. Les incompatibilités qu’elle avait révélées en rendaient le renouvellement très peu vraisemblable, et, par une conséquence naturelle, les tories se trouvaient fortifiés de toutes les chances que perdaient leurs adversaires. Peu à peu, d’ailleurs, les grands partis, désorganisés dix ans auparavant par la coalition, s’étaient reformés et régularisés. A mesure que les ressentimens personnels avaient perdu de leur vivacité, chacun s’était replacé sous son drapeau, les coteries avaient disparu, et avec elles cette oscillation perpétuelle qui avait rendu si long-temps la majorité précaire et mobile. Deux opinions bien distinctes, bien tranchées, se trouvaient désormais seules en présence, l’une appliquant ses principes au gouvernement, l’autre s’efforçant de faire triompher les siens par la discussion. L’Angleterre, en un mot, était rentrée dans les vraies conditions du gouvernement représentatif, et ce changement, salutaire pour le pays, utile en réalité à tous les partis, à qui il rendait de la franchise et de la dignité, avait pour premier résultat de donner une base plus solide à un ministère jusqu’alors chancelant. Lord Sidmouth devait, plus que personne, s’applaudir d’un revirement qui, après tant de vicissitudes et de variations, le replaçait au milieu de ses anciens amis et en face de ses anciens adversaires. La plupart des membres du cabinet avaient autrefois servi sous ses ordres, et le premier ministre lui-même, lord Liverpool, avait été jadis un de ses lieutenans. On pouvait donc s’attendre à le voir exercer une haute influence dans une administration où personne ne se distinguait par une position personnelle très élevée ni par des talens du premier ordre. Il n’en fut rien cependant, et, soit que son caractère ne fût pas assez fort pour l’appeler à ce rôle dominant que ne lui attribuait pas son titre officiel, soit que toutes ses facultés fussent absorbées par les devoirs, alors très laborieux, de son département ministériel, il semble avoir pris peu de part au règlement des grandes questions de guerre et de diplomatie devant lesquelles s’effaçaient alors toutes les questions de politique intérieure. L’Angleterre recueillait enfin le fruit de sa longue persévérance. Napoléon, dont les désastres de la campagne de Russie avaient ébranlé la fortune, voyait l’Europe entière se soulever contre lui et succombait après une lutte désespérée. L’Europe se réorganisait sur des bases conformes à l’intérêt des vainqueurs et particulièrement du cabinet britannique. Rien n’indique que lord Sidmouth soit intervenu avec autorité dans la direction imprimée à ces grandes négociations. On trouve cependant