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Page:Revue des Deux Mondes - 1847 - tome 20.djvu/292

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classes souffrantes. Les salles d’asile, les crèches, les ouvroirs, les caisses d’épargne, les caisses de secours et de prévoyance, les écoles d’apprentissage, les hôpitaux, les enfans trouvés, les maisons de refuge destinées comme celles du moyen-âge à recevoir les vieillards des divers métiers, le patronage des jeunes détenus, la création d’hospices payans, l’amélioration des hospices gratuits, ont été l’objet d’un nombre considérable de publications. On ne s’est pas contenté d’écrire ou de discuter des systèmes, on a toujours fait succéder la pratique à la théorie, quand il s’agissait de soulager des misères réelles. La bienfaisance publique, organisée aujourd’hui comme une grande puissance de l’état, est devenue un terrain neutre sur lequel se rencontrent tous les partis. Les théories égoïstes de l’école de Malthus sont vaincues dans les livres mêmes des économistes par les principes de la charité chrétienne, et l’on ne saurait dire tout ce qui se fait de bien aujourd’hui par les riches comme par les pauvres, principalement à Paris. On peut consulter à ce sujet le recueil périodique les Annales de la Charité ; on y verra que l’égoïsme qu’on a trop souvent avec raison reproché à notre époque n’a pas desséché toutes les ames. Un érudit qui sait le moyen-âge dans les moindres détails de ses mœurs et de ses institutions, M. Monteil, a dit que l’histoire des hôpitaux de France serait bonne à traiter et qu’elle serait aussi très bonne à lire ; nous dirons à notre tour aux socialistes et aux statisticiens, qui calomnient souvent la société en lui présentant sans cesse des listes de voleurs et de filles perdues, qu’ils auraient un beau livre à faire en prenant pour sujet la charité dans la France du XIXe siècle, car sans aucun doute, nous sommes heureux de le dire ici, nous avons vaincu nos aïeux dans l’art de soulager les misères publiques et privées. La charité chrétienne, qui fit au moyen-âge tant de choses admirables, sans rien perdre de son ardeur, a profité du progrès des sciences économiques et administratives pour s’organiser elle-même comme un des pouvoirs de l’état, et, dans aucune des circonstances pénibles que nous avons traversées depuis quinze ans, elle n’a manqué à sa mission ; elle a même donné plus qu’on n’eût été en droit de lui demander.


CHARLES LOUANDRE.