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Page:Revue des Deux Mondes - 1848 - tome 23.djvu/209

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province des Mines, d’autres des parties les plus centrales de l’empire. L’aspect singulier des hommes qui les accompagnent, les armes qu’ils portent, tout donne à ces caravanes quelque chose d’éminemment pittoresque.

Barbacena, que nous atteignîmes le 14 novembre, est la ville où nous espérions pouvoir réorganiser notre caravane. Malheureusement tout est difficile au Brésil, et, bien que Barbacena soit considérée comme la capitale des mules et des bâts, nous eûmes la plus grande peine à nous procurer les premières et à faire fabriquer les derniers. C’est aux environs de Barbacena que se terminent les forêts vierges, qui s’étendent à une centaine de lieues dans l’intérieur. Ces forêts sont ensuite remplacées par les immenses campos, ou plaines parsemées d’arbres peu élevés, qui, à de rares exceptions près, couvrent tout le centre du continent.

D’horribles chemins séparent Barbacena de Villa-Rica, aujourd’hui connue sous le nom d’Ouro-Preto. A part les mines de topazes de Capao, cette route n’offre rien d’intéressant. Ouro-Preto est la capitale de la plus belle province du Brésil, celle de Minasgeraës, qui possède à elle seule un cinquième de la population de tout l’empire. Ainsi que l’indiquent ses divers noms, cette cité forme le centre des vastes travaux de minéralisation qui placent le Brésil parmi les plus riches contrées du monde. Sa situation est des plus pittoresques. Ouro-Preto est entouré de tous côtés par de hautes montagnes, parmi lesquelles on distingue, à sa forme remarquable, celle d’Itacolumi.

Après une visite aux riches mines d’or de Catabranca, de Moroveilho et de Gongosoco, qui appartiennent à des compagnies anglaises et sont exploitées par de nombreux esclaves, nous dûmes prendre la route de Goyaz, et nous commençâmes enfin à faire connaissance. avec la nature sauvage. A mesure que nous avancions vers le sud, les établissemens devenaient plus rares ; mais aussi la variété des oiseaux augmentait sans cesse. Parmi les plus remarquables, je citerai les toucans, les jacamars, la belle pie à gorge ensanglantée, des perroquets, des perruches, et une foule de jolis oiseaux-mouches, tels que le diadème et le petasophor. Bientôt nous aperçûmes des bandes de l’autruche d’Amérique (nandou) qui fuyaient avec rapidité à l’approche de nos chevaux. Nous étions dans les plaines qu’arrose le San-Francisco, dont les eaux répandent des miasmes mortels et que l’on ne traverse qu’avec crainte.

Nous arrivâmes enfin à Goyaz. Cette ville est plus connue sous son ancien nom de Villa-Boa. La population, qui s’élève à sept ou huit mille habitans, n’est presque entièrement composée que de nègres et de gens de couleur. Nous fûmes admirablement reçus par le président de la province, don José d’Assiz de Mascaragnas, qui avait fait préparer d’aisance son palais pour notre réception. Si dans la province des Mines