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Page:Revue des Deux Mondes - 1850 - tome 5.djvu/1007

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BELLAH.

il est vrai, avoir embrassé dans la pacification tous les pays insurgés, l’Anjou, la Bretagne et la Haute-Vendée ; mais les représentans et les généraux républicains connaissaient trop bien les intrigues persévérantes des agences royalistes de Paris et de Londres, pour avoir eu, en proposant cet armistice, un autre but que d’augmenter les divisions dans les rangs des rebelles et de détacher les paysans de la guerre par l’habitude, reprise peu à peu, de leurs paisibles travaux. D’un autre côté, l’excès même des avantages faits aux royalistes dans les clauses patentes ou secrètes de ces traités aurait suffi à éveiller la méfiance des chefs de ce parti, quand même ils auraient apporté aux conférences une sincérité que les documens les moins cachés de l’histoire ne permettent pas de leur supposer. L’amnistie avait pu sans doute être proposée et acceptée avec une bonne foi réciproque ; mais il n’en pouvait être de même des articles qui, organisant en gardes territoriales, sous le commandement des généraux royalistes, les Vendéens et les chouans les mieux aguerris, laissaient subsister un état dans l’état, un foyer permanent de rébellion au sein de la république. Il n’en pouvait être de même surtout de ces concessions secrètes et inouies, parmi lesquelles on comptait l’engagement de rendre le jeune Louis XVII aux chefs armés en son nom, et dont l’authenticité n’a pu être accréditée que par un témoignage impérial. La crédulité des diplomates vendéens en face de ces invraisemblances politiques ne se concevrait pas, si l’on ne savait que, tout en feignant de les prendre au mot, ils prouvaient par leurs menées qu’ils en appréciaient exactement la valeur. Cette paix enfin n’était, au moins dans la conviction de ceux qui l’avaient conclue, qu’une suspension d’armes dans laquelle chacun des deux partis avait cru également trouver son intérêt. Toutefois il est permis de penser que quelques chefs royalistes avaient pu regarder comme sérieuses les obligations les plus incroyables de ces traités volontairement suspects.

Il était nécessaire de rappeler ce détail de l’histoire du temps pour faire comprendre la suite de ce récit ; mais on ne voudra pas conclure de cette digression superficielle que ce roman ait la moindre prétention historique : c’est un titre qu’il ne peut soutenir d’aucune façon, et qui nous engagerait bien au-delà de nos connaissances et de nos forces. Un conte doit s’efforcer sans doute de ne pas choquer d’une manière inconvenante les vraisemblances de l’époque et des mœurs dont il affiche les couleurs ; mais sa frivolité avouée nous paraît le dispenser d’un scrupule plus sérieux.

La caravane fit halte dans un village, et prit une heure de repos tout en dînant ; puis le voyage continua jusqu’au soir, sans autre incident que la rencontre de quelques cantonne mens républicains, avec