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Page:Revue des Deux Mondes - 1850 - tome 5.djvu/1036

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REVUE DES DEUX MONDES.

impossible de pénétrer chez ces messieurs, qui sont en force et sur le pied de guerre dans toute la contrée. — Et attendez, poursuivit le général, en écrivant deux lignes à la hâte sur un carré de papier, cacha cela dans la doublure de vos habits, afin d’être également en mesure vis-à-vis de la république.

— Mon général, votre bonté me rend confus.

— Je voudrais vous faireoublier ce mauvais quart d’heure, Pelven. Allez maintenant à la garde de Dieu. J’espère que vous me quittez sans rancune.

Hervé prit de ses deux mains la main que le général lui offrait, et la serra avec émotion. —Adieu, général, dit-il, je vais acheter le droit de vous revoir et de continuer à vous servir.

— Non pas moi, Pelven, jamais moi, mais la France, mais la république, la république forte, patiente et généreuse.

— C’est comme je l’entends, dit Hervé. Il s’inclina avec une courtoisie affectueuse, et sortit accompagné de Francis.

Quelques instans plus tard, Pelven et le petit lieutenant galopaient dans la direction de Rennes ; mais, au bout de deux lieues, Hervé dot prendre un chemin de traverse, afin d’éviter la ville, qui pouvait être dangereuse pour lui. Ce fut là que les deux jeunes amis se séparèrent, deux heures environ avant le coucher du soleil, l’un pour retourner près du général en chef, l’autre pour courir les nouveaux hasards où le poussaient, contre tous les conseils de la prudence, les sentimens fougueux de l’homme outragé et de l’amant jaloux.

Octave Feuillet.

(La troisième partie au prochain n°.)