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Page:Revue des Deux Mondes - 1850 - tome 5.djvu/310

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mauvaise grace, que déjà la ruine de la Hongrie se consommait. Enfin les Serbes et les Croates n’apprirent les concessions fort restreintes qui les concernaient qu’après la catastrophe, avec la nouvelle de la défaite de Temesvar et de la capitulation de Vilagos.


III

Vilagos et Temesvar, l’anéantissement des corps d’armée de Bem et de Dembinski et la soumission de Georgey, voilà en effet où devaient rapidement aboutir les incertitudes du gouvernement magyar. C’est en vain que M. Kossuth avait rendu à Dembinski le pouvoir militaire sous le nom de Messaros. Dès cette époque, il était trop tard. Déjà les trois principaux corps d’armée étaient séparés de manière à ne pouvoir plus se réunir que par des coups de fortune. Georgey était devant Comorn et Waitzen, entouré par les Autrichiens et les Russes, et dans l’impossibilité de leur échapper sans une ruse de guerre. Dembinski, à sa sortie de Pesth, se voyait poursuivi vers Szegedin par le corps de Haynau. Bem, de son côté, avait sur les bras, d’une part les Serbes de Knitchanin et du ban de Croatie, qui remontaient du midi au nord, avec la mission spéciale d’empêcher la jonction des deux généraux polonais, et de l’autre les Austro-Russes qui étaient accourus de la Valachie en violant la neutralité du territoire ottoman. Dembinski, dont le désir avait toujours été de se replier vers les montagnes de la Transylvanie méridionale pour y faire sa jonction avec Bem, en attendant Georgey, n’acceptait qu’à regret la bataille que les Autrichiens lui offraient dans les environs de Szegedin. Il fallut combattre cependant, et, une fois l’action engagée, les Polonais et les Magyars se défendirent avec ténacité ; mais les Magyars qui formaient le corps de Dembinski étaient peu aguerris. Georgey s’était réservé les seules troupes qui fussent habituées au feu ; Dembinski ne commandait guère qu’à des recrues. Les Autrichiens avaient donc à Szegedin la supériorité du nombre et de l’expérience ; ils vainquirent. Dembinski fut rejeté vers Temesvar, obligé de faire face à L’ennemi à chaque moment dans cette brillante et douloureuse retraite.

Les combats livrés près de Szegedin sont les plus considérables d’entre ceux qui ont signalé cette guerre depuis l’intervention des Russes. Sur un autre théâtre, la lutte n’est pas moins acharnée et présente peut-être un caractère plus saisissant. Bem ne saurait s’avouer vaincu tant qu’il a quelques centaines d’hommes de bonne volonté et de l’artillerie. Rien de plus varié que ses expéditions. On le croit anéanti ; aujourd’hui il n’a plus que deux canons ; deux chevau-légers se précipitent sur les affûts pour lui enlever cette dernière ressource ;