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Page:Revue des Deux Mondes - 1850 - tome 8.djvu/915

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Bible et dans les poèmes d’Homère, la description de plusieurs ouvrages de ce genre, et l’on pourrait citer parmi les plus anciens exemples de gravure les caractères placés sur le pectoral de jugement du grand-prêtre Aaron, ou les sujets qui enrichissaient les armes d’Achille. Les Égyptiens, les Grecs et les Étrusques nous ont laissé un nombre infini de pièces d’orfèvrerie et de fragmens de toute espèce, qui ne permettent pas le moindre doute sur l’existence de l’art dans leur pays. Enfin personne n’ignore que l’usage des sceaux en métal et des cachets gravés sur pierre fine était général chez les Romains. La gravure, dans le sens littéral du mot, n’est donc pas une invention due à la civilisation moderne ; mais il a fallu que bien des siècles s’écoulassent avant que l’on arrivât à multiplier, par la voie de l’impression, les travaux du burin sur un exemplaire unique. L’art, fruit de cette découverte, a reçu par extension le nom de gravure, et ce nom désigne aujourd’hui l’opération qui produit une estampe.

La gravure, prise dans cette acception, peut se diviser en deux genres principaux : l’un embrasse les procédés au moyen desquels chaque trait dessiné sur la planche se trouve mis en relief par le graveur et s’imprime sur le papier par l’effet même de cette saillie ; l’autre comprend les procédés tout opposés, ceux qui consistent à reproduire le dessin par des sillons que remplit ensuite la matière colorante, et à laisser intact le reste de la planche. La gravure sur bois ou en taille d’épargne appartient au premier de ces deux genres, la gravure au burin ou en taille-douce appartient au second. Pour graver en taille d’épargne, on choisit une planche de bois dur et lisse, tel que le buis ou le poirier. Sur cette planche, dont l’épaisseur est de quelques centimètres, on dessine à la plume non-seulement l’ensemble de la composition, mais encore tous les détails déterminant l’effet, depuis l’ombre la plus intense jusqu’à la plus faible demi-teinte. Puis, on creuse avec un instrument tranchant les parties qui doivent rester blanches dans l’estampe, et les parties sur lesquelles la plume s’est arrêtée, subsistant seules à la hauteur de la surface première, déposent sur l’épreuve l’encre d’impression qu’elles ont reçue. Ce mode de gravure dont on ne connaît pas l’inventeur, et qui semble antérieur de près d’un demi-siècle à la découverte de l’imprimerie, donna naissance à la gravure en camaïeu, que Pilgrim et Ugo da Carpi pratiquèrent les premiers en Allemagne et en Italie. En gravant de cette manière, on suit la marche ordinaire de la gravure en taille d’épargne, c’est-à-dire qu’on évide le bois dans toutes les parties qui doivent rester incolores ; seulement, au lieu d’opérer sur une surface unique, on a des planches séparées pour tailler les contours, les ombres fortes et les demi-teintes, et l’on tire une épreuve en l’appliquant successivement sur ces planches qui correspondent exactement entre elles. La gravure en taille-douce, fort