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Page:Revue des Deux Mondes - 1853 - tome 4.djvu/735

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dites de commerce, quel que soit d’ailleurs le bénéfice qu’il pourrait en retirer… »

— Mais, interrompit Francis, à quoi peut-on reconnaître qu’on s’éloigne de cette intégrité ? Où s’arrête l’art ? où commence le métier ? Quand on a du talent, on le prouve dans toutes ses productions, et une œuvre ne perd aucun de ses mérites parce qu’elle a été payée.

— Il ne s’agit pas de cela, dit Lazare. Quand on a du talent, en eût-on même beaucoup, on risque de le compromettre en se livrant aux faciles improvisations, à l’inutile excès d’habileté, qui éloignent de l’étude sérieuse, pour un temps moins productive que les travaux frivoles dont le placement offre moins de difficultés. En faisant du fac-similé, on arrive à ne plus savoir faire du vrai, on commence par duper les autres, on finit par se duper soi-même. Voilà l’explication de notre article 5. Si vous n’avez pas compris, dit Lazare avec une apparence d’ironie, levez la main, je ne demande pas mieux que de répéter.

— J’adhère à cet article comme aux autres, répliqua Francis, et je connaissais déjà en partie toutes les clauses de votre contrat. Venir ici, c’était vous dire que je les acceptais.

— Alors, continua Lazare, il ne vous reste plus, si cela est actuellement dans vos moyens, qu’à verser la petite cotisation spécifiée par le dernier article, des fonds, qui malheureusement n’ont jamais le temps de se grossir, sont tenus à la disposition des membres qui prouvent en avoir besoin pour leurs travaux. Ils ne peuvent recevoir aucune autre destination, et les nécessités de la vie matérielle, si pressantes qu’elles soient, n’autorisent aucun de nous à y recourir. Ceux qui n’ont pu verser la cotisation aux époques convenues sont tenus à remplir les lacunes dès qu’ils en ont acquis les moyens. La caisse ne prête pas d’argent : elle refuserait quarante sous à vingt minutes d’échéance.

Comme c’était précisément le premier jour du mois, deux membres de la société, les seuls qui gagnassent régulièrement quelque argent, versèrent leur cotisation entre les mains du président-caissier. — Ceux qui ont quelque chose à me demander peuvent prendre la parole, dit Lazare, qui était aussi le caissier de l’association.

— Moi ! j’ai quelque chose à demander, dit le peintre Soleil, qui habitait le même logis que les deux frères Antoine et Paul.

— Explique-toi, dit Lazare.

— Eh bien ! fit Soleil d’un air très embarrassé,… je voudrais,… mais tu ne voudras pas…

— Quoi, quoi ? fit le caissier impatienté, parle toujours.

— Eh bien ! s’écria Soleil tout d’un trait, comme un homme qui