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Page:Revue des Deux Mondes - 1854 - tome 5.djvu/192

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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.


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31 décembre 1853.

S’il est une heure faite pour raviver le sentiment de l’insaisissable rapidité avec laquelle marche la vie des peuples et des hommes, c’est bien l’heure actuelle, qui vient une fois encore marquer l’imperceptible limite entre deux années. Elle va sonner, cette heure, au milieu des frissons de l’hiver, comme le glas funèbre d’une période qui disparaît, comme le chant de joyeux avènement d’une année nouvelle : image du temps, d’un côté vieux et cassé, de l’autre toujours jeune, mourant à chaque instant pour revivre sans cesse ! Nous sommes là entre le passé, où nous pouvons lire notre propre histoire comme dans le livre le plus instructif, et l’avenir scellé d’un triple sceau. Quelque inconnu qu’il soit cependant, cet avenir a son germe dans le passé ; ce que nous savons, ce que nous avens vu est le commencement de ce qui s’accomplira ; chaque jour ne fait que dégager une certaine logique mystérieuse des choses qui se crée une issue et éclate à travers des événemens nouveaux. — 1853 en un mot prépare 1854. Et qu’a-t-elle donné au monde, cette année qui s’en va ? Quel héritage laisse-t-elle ? Le premier comme le dernier mot de son histoire à coup sûr, c’est cette crise qui ébranle l’Orient et tient l’Europe dans l’attente. Il y a un an, tout était calme vers l’Orient, et même sur le reste du continent ; tout au plus la diplomatie était-elle occupée de savoir sous quelle forme et dans quels termes l’empire renaissant en France serait reconnu par les autres puissances. Grand problème ! c’était pourtant le moment où d’autres affaires se préparaient pour la diplomatie. Deux mois n’étaient point passés, que la question de l’équilibre de l’Europe et de la sécurité continentale était posée à Constantinople par la mission du prince Menchikof. Qu’a-t-on vu depuis cette époque ? On n’a cessé de voir les complications s’agrandir, les antagonismes se dessiner avec plus de vivacité, tous les efforts de pacification devenir inutiles, la guerre entre la Russie et la Turquie naître de l’impuissance des négociations, — si bien qu’ayant com-