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Page:Revue des Deux Mondes - 1854 - tome 5.djvu/661

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l’Europe ne désarmerait point avant que les partis eux-mêmes n’eussent désarmé, et que c’était dans la Vendée qu’il fallait couper le nœud des coalitions. Aussi à peine fut-il installé aux Tuileries, que des agens nombreux partaient pour cette contrée désolée, chargés d’y suspendre les hostilités tout en y multipliant les préparatifs militaires. Ils portaient enfin des paroles de conciliation et de paix sur cette terre qui avait dévoré tant d’armées, et promettaient à ses fils de leur rendre ces autels pour lesquels ils avaient livré tant d’héroïques combats. Ces engagemens, pris au nom d’un homme assez fort pour ne pas promettre en vain, étaient accueillis avec empressement par la plupart des chefs vendéens, placés entre des promesses honorables et une résistance armée manifestement impossible, et la paix de Montfaucon venait fermer la plaie la plus douloureuse de la France.

La pacification de la Vendée fit tomber les armes des mains de tous les partis, et ne leur laissa plus que le poignard ; mais ce qu’on venait de faire si habilement dans l’ouest pour désarmer des hostilités qui n’avaient jamais été plus prés d’éclater qu’à la veille du 18 brumaire, il fallait l’opérer partout, si l’on aspirait à relever le pays de son profond abaissement moral, si l’on tenait à rendre à la civilisation cette terre de France, devenue, aux mains de roués impurs et de mathématiciens athées, la proie d’une sorte de barbarie savante.

La loi fondamentale de l’an VIII avait proclamé la liberté des cultes ; mais une pareille déclaration était sans valeur là où des lois révolutionnaires, encore en pleine vigueur, avaient expulsé du territoire, lorsqu’elles ne les avaient pas envoyés à l’échafaud, tous les prêtres qui avaient refusé à la tyrannie un serment contraire à leur conscience. Rappeler de l’exil ou du fond de leurs secrets asiles ces confesseurs de la foi catholique, en substituant au serment à la constitution civile du clergé une simple promesse de soumission aux lois qui régissaient la république, rendre aux ministres du culte des temples profanés, dont les prêtres assermentés avaient fini d’ailleurs par ne guère profiter plus que les autres, tel fut le premier souci du général auquel un infaillible instinct révélait par quelle force se fondent et grandissent les pouvoirs. Mais c’étaient là des mesures visiblement incomplètes, et l’ardente pensée qui les avait conçues ne pouvait s’arrêter à l’entrée de la voie si hardiment ouverte. Sous peine d’échouer dans son œuvre d’universelle réparation, il fallait vaincre l’anarchie sous toutes ses formes, et triompher des sectes comme des partis. Aspirer en 1801 à régler les rapports de l’ordre religieux avec l’ordre politique, ce n’était, comme on l’a