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Page:Revue des Deux Mondes - 1856 - tome 1.djvu/822

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Haddington, dont le cône s’élève à plus de 2,000 mètres, et le Mont-Penny ; il s’assura que la terre Louis-Philippe n’était qu’une grande île, parcourut tout le détroit de Bransfield, qui la sépare de l’archipel des Shetlands du sud, et visita cet archipel.

Ross avait, dans ses campagnes à la zone arctique, déterminé et atteint le pôle magnétique boréal ; il avait aussi espéré arriver au pôle magnétique austral, et il aurait eu ainsi la gloire d’avoir reconnu ces deux points remarquables, placés dans des régions antipodes du globe ; mais le pôle magnétique austral est placé à une très grande distance dans l’intérieur de l’inabordable terre Victoria, ou plutôt, si cette terre s’unit en continent avec les terres découvertes par d’Urville et Wilkes, vers la partie centrale de cette portion du continent. Gauss avait été conduit, par sa grande et belle théorie du magnétisme terrestre, à déterminer la position de ce point, et il était arrivé à un résultat qui ne diffère pas d’une manière très sensible de celui que Ross a indiqué comme résultat des observations nombreuses qu’il fit dans son voyage. Je dois ajouter que ses déterminations ont été attaquées en France par M. Duperrey, et que le pôle de Wilkes diffère à la fois très notablement de ceux de Gauss, de Ross et de M. Duperrey.

Quand Ross eut annoncé qu’il avait passé avec son vaisseau au milieu d’une région où Wilkes avait marqué des montagnes, cette déclaration excita une grande surprise, et souleva entre les deux marins anglais et américain une polémique fort vive. À moins d’imaginer que ces montagnes étaient descendues sous la mer, il semble qu’il n’y eût rien à répondre à l’affirmation énergique, indubitable du capitaine Ross. Wilkes se tira pourtant d’embarras : il le fit d’une manière que l’on peut qualifier très diversement, mais que personne ne manquera sans doute de trouver fort habile. Il déclara que, dans la carte qu’il avait complaisamment envoyée à Ross, il avait marqué non-seulement ses propres découvertes, qui occupent près de 70 degrés sur le cercle polaire antarctique, mais qu’il avait aussi indiqué vers l’une des extrémités de cette longue ligne les découvertes que l’Anglais Balleny avait faites quelque temps auparavant ; les côtes qu’à son retour de la terre Victoria Ross avait en vain recherchées étaient précisément ces dernières, qui se trouvaient mal indiquées sur la carte, parce que Wilkes ne connaissait qu’approximativement leur forme et leur position. On avait omis, comme c’était son intention, d’écrire à côté de cette partie de la carte « découverte anglaise. » Il n’y avait donc dans tout cela qu’une erreur de dessin et un oubli. L’explication assurément était fort ingénieuse ; Ross fut pourtant assez difficile pour ne pas s’en contenter. Il répliqua qu’il lui paraissait inexplicable que le commandant américain eût si mal